Peut-être que ce que souhaite le plus « Hezbollah » à ce stade, c’est que se poursuive la joute politique et médiatique autour des armes — qu’il s’agisse de « désarmement », de « collecte des armes », ou encore de la formule retenue par le gouvernement : « restreindre les armes à l’État ». Tant que ce débat perdure, il détourne l’attention de la véritable tragédie : le sort de milliers de personnes dont les moyens de subsistance dépendaient autrefois de « Hezbollah ».

Ces personnes se répartissent en plusieurs catégories :

- Combattants à plein temps.

- Combattants à temps partiel.

- Membres des réseaux de surveillance contrôlant les entrées et sorties des zones d’influence de « Hezbollah ».

- Employés des vastes institutions sociales de « Hezbollah », qu’il s’agisse de santé ou d’éducation.

- Bénéficiaires des programmes sociaux du « Hezbollah ».

- Investisseurs dans la structure financière du parti, « al-Qard al-Hasan ».

Pour beaucoup parmi la base de soutien de « Hezbollah » — des centaines de milliers dans son environnement élargi — le prix a été dévastateur. Ils ont perdu leurs maisons, leurs biens, leurs emplois ou des proches, soit à cause de leur affiliation au parti, soit parfois sans aucune raison. Aujourd’hui, ils font face à un avenir incertain, abandonnés par ceux qui leur avaient prodigué des promesses restées lettre morte.

Les récents développements montrent également que ceux qui ont fui le sud du Liban sous les bombardements israéliens ne pourront pas rentrer de sitôt. Leur retour, tout comme la reconstruction, est désormais conditionné par Israël — notamment au démantèlement complet de l’infrastructure militaire de « Hezbollah », comme le stipule l’accord de cessez-le-feu accepté par le gouvernement libanais le 27 novembre 2024.

La guerre des mots qui continue à propos des armes masque cette catastrophe humanitaire en pleine expansion, appelée à s’aggraver alors que l’économie parallèle et illégale qui a longtemps soutenu « Hezbollah » — au détriment de l’État libanais — est en cours de démantèlement.

Ce bras de fer politique et médiatique permet en outre de hausser le ton, d’élever la rhétorique et les menaces — sans justification et sans résultat.

Les Libanais sont aujourd’hui plus convaincus que jamais que « Hezbollah » n’est que l’écho des décisions prises à Téhéran. Il en a toujours été ainsi, et il en est encore ainsi aujourd’hui.

À leurs yeux, les malheurs que « Hezbollah » a infligés à lui-même, à sa base, à ses partisans et au Liban ont détruit l’aura qu’il avait patiemment bâtie depuis vingt ans. Les événements des deux dernières années l’ont ramené à sa véritable dimension locale, confirmant sa dépendance extérieure. Cela s’est illustré clairement lors de la récente visite du responsable iranien Ali Larijani au Liban.

Quant aux armes de « Hezbollah » — ou à ce qu’il en reste — elles ne constituent peut-être plus le problème central. Le plan que présentera bientôt l’armée libanaise pour exécuter la décision du gouvernement de limiter les armes aux institutions légitimes de l’État comprendra plusieurs options, chacune assortie de son coût. Il ne fait guère de doute que la classe politique, consciente de la gravité et de la sensibilité du moment, adoptera une ou plusieurs de ces options. L’on s’attend d’ailleurs à ce qu’elle commence par le ramassage des armes des groupes armés non libanais, car leurs armes — tout comme celles de « Hezbollah » — ont perdu toute fonction lorsqu’elles sont utilisées depuis le territoire libanais.

La fin du mois apportera des réponses claires.