Le « Hezbollah » a revendiqué une « victoire éclatante » lors de la bataille du Rocher de Raouché. Le groupe a « occupé » les trottoirs qui dominent le site, déployé ses embarcations autour de ce lieu emblématique et l’a illuminé avec les portraits de ses deux dirigeants assassinés. Il a ainsi adressé son message au gouvernement et imposé sa volonté.

Pendant ce temps, le Premier ministre s’est retrouvé seul face à une campagne féroce orchestrée par les relais du « parti ». Bien que le « Hezbollah » se soit abstenu de l’attaquer directement, ses suppôts se sont acharnés contre le chef du gouvernement. Allant meme jusqu’à accuser le Premier ministre d’etre un « sioniste » .

Pourquoi ? Parce que le Premier ministre a insisté pour appliquer l’engagement du gouvernement d’étendre la souveraineté de l’État sur l’ensemble du territoire libanais, y compris l’exclusivité du contrôle du port d’armes par les forces militaires et sécuritaires légitimes. Il a également publié une directive interdisant aux services de sécurité de permettre l’utilisation de sites nationaux ou historiques comme le Rocher de Raouché à des fins politiques. Deux députés affiliés au « Hezbollah » avaient même signé un accord avec le gouverneur de Beyrouth, en présence du ministre de l’Intérieur, s’engageant à ne pas illuminer le Rocher. Mais l’élan émotionnel de l’anniversaire a balayé cet engagement.

Le parti a mis en scène sa démonstration de force pour rappeler qu’il conserve le pouvoir de décision au Liban. Mais en réalité, ce n’est plus le cas.

Les promesses non tenues du désarmement

Contrairement à ce qu’affirme « Hezbollah », l’accord de cessez-le-feu qu’il avait autrefois accepté exige en fait le démantèlement de toutes ses structures militaires et la remise de ses armes sur l’ensemble du territoire libanais. Cela n’a jamais eu lieu, et, à en juger par la récente déclaration de son secrétaire général Naim Qassem, cela ne se fera jamais.

Un député du parti a même révélé qu’un arrangement avait été conclu avec le (alors) candidat présidentiel Joseph Aoun entre les deux séances du vote parlementaire, que le « Hezbollah » remettra les armes seulement au sud du Litani. C’est pour cette raison seulement que le parti avait voté pour lui. Si cela est vrai, cela signifie que le parti a reçu une promesse d’une personne qui n’avait pas le pouvoir de la donner.

Tant que les structures armées illégales ne seront pas démantelées et que les armes ne seront pas rendues, Israël ne se retirera pas des points occupés, la reconstruction ne commencera pas et les déplacés ne rentreront pas chez eux.

Ceci soulève des interrogations directes pour le « Hezbollah » : qu’est-ce qui importe le plus, illuminer le Rocher de Raouché ou obtenir le retrait d’Israël, reconstruire le Sud et permettre aux familles déplacées de rentrer chez elles ?

Les contradictions de la « résistance armée »

La déclaration du secrétaire général de « Hezbollah » : « nous ne quitterons pas le champ de bataille et nous ne remettrons pas nos armes », soulève aussi d’autres interrogations. Où se trouve exactement le « champ de bataille » ? Il devrait être à la frontière du Liban avec Israël. Or, où se trouve le parti aujourd’hui ? A partir de quelle position compte-t-il utiliser ses armes contre Israël ? A quoi servent les armes stockées dans la plaine de la Békaa, ou dans les banlieues sud de Beyrouth ou ailleurs, si elles ne sont pas déployées sur les lignes de front ? De fait, elles ne le sont pas.

La crainte est que l’occupation israélienne persistante serve de prétexte au « Hezbollah » pour conserver ses armes, et que la conservation des armes par le « Hezbollah » serve de prétexte à la poursuite de l’occupation israélienne.

Le recul de l’influence libanaise

Ces inquiétudes prennent une importance grandissante à la lumière des récentes déclarations de l’envoyé présidentiel américain Tom Barrack, un Américano-Libanais, qui a qualifié l’attitude de l’État libanais « gros parleur, sans action », avec en plus, l’accueil tiède réservé au président libanais sur la scène internationale.

· Son discours à l’Assemblée générale de l’ONU a été programmé tard dans la nuit, heure de Beyrouth, de sorte que la plupart des Libanais n’en ont pris connaissance que le lendemain.

· Son agenda officiel à New York n'inclut aucune rencontre avec des dirigeants arabes ou européens de premier plan, y compris le président français Emmanuel Macron et les responsables saoudiens qui organisent une conférence pour soutenir l’armée libanaise.

· La seule entrevue avec de hauts responsables américains fut une brève rencontre avec le secrétaire d’État Marco Rubio, alors que le président syrien Ahmad al-Char’a, lui, s’est entretenu deux fois avec le président Trump.

Bien qu’ils aient été tous deux présents à New York, le président Aoun n’a rencontré son homologue syrien, que pour une simple poignée de main.