Le discours du président américain Donald Trump devant l'Assemblée générale des Nations Unies mardi dernier a livré un message critique, fort et agressif qui cristallise la relation de plus en plus tendue entre les États-Unis et l'ONU. Dans son discours, Trump a ouvertement remis en question la raison d'être de l'organisation, qualifiant ses actions de simples « paroles très fermes [qui] ne sont jamais suivies d'aucune action » les décrivant comme des « paroles vides » qui ne parviennent pas à résoudre les conflits réels. Il a comparé cette inefficacité avec les réalisations de sa propre administration, affirmant avoir mis fin à « sept guerres impossibles à terminer », et ce sans l'aide de l'ONU. Sa condamnation s'est étendue aux politiques internationales sur la migration et le changement climatique, dénonçant ce dernier comme « la plus grande arnaque jamais perpétrée dans le monde ». Ce discours a mis en lumière le profond scepticisme de l'administration envers le multilatéralisme et a contesté le rôle fondamental et l'efficacité de l'ONU dans la gouvernance mondiale.

Cependant, Trump n'est pas le premier président américain à censurer l'ONU. Richard Nixon était entré en conflit avec l'ONU en 1969 lorsqu'il a déclaré vouloir mettre fin à la guerre du Vietnam « sans concessions », et avant lui, Harry Truman avait tiré la sonnette d'alarme. La position tendue des États-Unis envers l'ONU est enracinée dans un conflit plus large sur l'orientation et la réforme de l'organisme international. Pendant des décennies, Washington a pressé une réforme complète de l'ONU – exigeant une réduction du gaspillage, une rationalisation opérationnelle et un recentrement sur les missions de paix et de sécurité. Cependant, cet appel à la réforme est souvent sélectif, soutenant les changements alignés sur les intérêts américains tout en résistant à ceux qui pourraient diluer l'influence de l'Amérique ou défier sa souveraineté.

L'opposition américaine à certaines propositions de réforme découle largement des complexités structurelles et géopolitiques de l'institution. Au cœur de la résistance se trouve le Conseil de sécurité de l'ONU, où les États-Unis, avec les quatre autres membres permanents (Royaume-Uni, Russie, Chine et France), détiennent un droit de veto. Bien que ce véto ait été conçu pour empêcher des décisions précipitées, il permettait également aux cinq membres permanents d'entraver les réformes qui pourraient réduire leur influence ou réaligner les structures du pouvoir mondial. La partialité perçue et la nature non représentative du Conseil de sécurité, en particulier pour des régions comme l'Afrique et l'Amérique du Sud, intensifie le débat sur la réforme, et les membres permanents, particulièrement les États-Unis, restent réticents à affaiblir leurs positions privilégiées.

Le rôle américain dans l'entrave à la réforme de l'ONU

Les États-Unis ont joué un rôle paradoxal dans le discours sur la réforme de l'ONU. D'un côté, ils insistent pour une ONU plus efficace, responsable et axée sur les résultats, un sentiment exprimé dans les plaintes de Trump sur les coûts de rénovation du siège de l'ONU et les inefficacités opérationnelles. De l'autre, ils bloquent ou entravent les réformes qui pourraient saper leurs avantages stratégiques, que ce soit en préservant les pouvoirs de veto, en s'opposant à l'élargissement de la composition du Conseil de sécurité ou en limitant le financement des organes de l'ONU qui critiquent les politiques américaines. Par exemple, Washington a retiré à plusieurs reprises ses fonds et réduit son soutien à des agences onusiennes comme le Conseil des droits de l'homme et l'UNESCO en raison d'un prétendu parti pris anti-israélien et d'autres désaccords.

Cette dynamique contradictoire a conduit certains critiques à accuser l'Amérique d'affaiblir l'ONU à un moment où les défis globaux nécessitent une coopération multilatérale plus forte. Alors que l'administration américaine vante les réformes et exige une plus grande efficacité, elle réduit également le financement de l'ONU, sapant ainsi les réformes mêmes qu'elle prétend soutenir. De telles actions risquent d'éroder la capacité opérationnelle de l'ONU à un moment critique, créant potentiellement un vide que des puissances rivales comme la Chine et la Russie sont impatientes de combler.

Perspectives divergentes sur l'initiative UN 80

L'approche du gouvernement américain envers l'ONU reflète un scepticisme plus large envers les institutions internationales perçues comme empiétant sur la souveraineté nationale, un thème souligné par Trump en défendant la souveraineté nationale et en avertissant que « le concept globaliste entier... doit être rejeté complètement et totalement ». À l'inverse, de nombreux États membres et responsables onusiens soutiennent que la réforme doit préserver le mandat collectif de l'ONU pour traiter les problèmes globaux comme le changement climatique, les crises migratoires, la prévention des conflits et l'aide humanitaire.

Cette divergence se joue activement autour de l'initiative UN 80, un effort de réforme ambitieux et systémique lancé par le Secrétaire général de l'ONU António Guterres en mars 2025. Cette initiative vise à renforcer la manière dont l'ONU sert les populations partout dans le monde en améliorant l'efficacité, en examinant des milliers de mandats caducs et en explorant des changements structurels. Le Secrétaire général Guterres a souligné le besoin d'agilité, d'inclusivité et de transparence financière – des objectifs qui nécessitent à la fois le soutien des États membres et un financement suffisant, y compris de la part du pays hôte. Cependant, le succès de l'initiative de Guterres dépend du soutien des États membres.

Implications pour la gouvernance mondiale

La tension entre les États-Unis et l'ONU a des implications significatives pour la gouvernance mondiale. L'ONU reste la plateforme suprême pour la diplomatie multilatérale, le maintien de la paix et la coordination humanitaire. Cependant, le scepticisme persistant des États-Unis et leurs tactiques obstructives entravent les progrès sur des réformes nécessaires depuis longtemps et affaiblissent la capacité de l'organisation à agir avec détermination dans les crises.

Le rejet direct par la voix-mème de Trump, des rôles clés de l'ONU, son approche transactionnelle des alliances et son appel à des politiques nationales unilatérales soulignent un changement plus large vers une diplomatie nationaliste qui défie les normes coopératives de l'ordre international d'après-Seconde Guerre mondiale. Cette approche complique les efforts pour traiter les questions transnationales nécessitant une coopération globale, du changement climatique à la préparation aux pandémies. Dans le même temps, Washington continue d'utiliser son privilège au Conseil de sécurité pour bloquer les résolutions qu’il considère contraires à ses intérêts – comme celles concernant Gaza – alimentant les accusations de deux poids deux mesures et diminuant la légitimité de l'ONU aux yeux de nombreux pays.

Alors que les États-Unis exigent une ONU plus maigre et plus efficace qui priorise les intérêts américains, leur blocage simultané des réformes et leurs retraits du financement risquent d'affaiblir l'institution même qui sert de forum principal pour la diplomatie mondiale. Parvenir à un changement significatif et maintenir une gouvernance mondiale efficace nécessite un équilibre délicat – qui navigue entre les impératifs concurrents de la souveraineté nationale, de la coopération globale et d'une gouvernance équitable.