Contrairement aux visites précédentes des responsables américains, la récente venue de Thomas Barrack au Liban n’a pas apporté de développements majeurs ni alarmants. Elle n’a pas non plus indiqué si le Liban demeure une priorité sur la carte des intérêts internationaux comme ce fut le cas autrefois.

Aujourd’hui, les préoccupations principales de Washington au Liban se résument à deux dossiers : la relation avec la Syrie, notamment à travers le processus de délimitation des frontières, et la nécessité d’assurer le désarmement du Hezbollah.

Concernant les frontières, un point sensible reste l’affaire des fermes de Chebaa. La communauté internationale — en particulier les États-Unis et Israël — insiste pour obtenir une reconnaissance officielle par la Syrie de la souveraineté syrienne sur cette zone. L’objectif est clair : retirer au Hezbollah son principal argument de « résistance armée ». Des sources indiquent que cette question sera abordée lors de la visite attendue d’un émissaire syrien au Liban, dont la date dépendra des développements de la guerre en cours entre Israël et l’Iran.

Lors de ses réunions à Beyrouth, Barrack a soulevé les deux sujets — les fermes de Chebaa et l’arsenal du Hezbollah — exprimant, sur un ton plus suggestif que impératif, le souhait que toutes les armes soient placées sous le contrôle exclusif de l’État libanais.

En tant qu’envoyé spécial pour la Syrie, Barrack a rencontré les principaux dirigeants libanais, notamment le président de la République, le président du Parlement et le Premier ministre. Il a mis en garde, de manière posée, contre la sensibilité de la situation régionale. Il n’a posé aucun ultimatum, mais a prodigué des conseils et formulé des vœux pour que le Liban règle ses différends avec la Syrie. Il a insisté sur la nécessité pour les deux pays d’entretenir une relation solide, car toute instabilité dans l’un rejaillit inévitablement sur l’autre.

Il a également encouragé une avancée sur le dossier de la démarcation des frontières, y compris les fermes de Chebaa, tout en évoquant la question des réfugiés syriens, appelant à une entente après la levée des sanctions.

Contrairement à son prédécesseur Morgan Ortagus, Barrack n’a pas adopté un ton provocateur ou menaçant. Il a tenu ses propos avec calme et compréhension. Il a expliqué que, bien que son portefeuille principal soit la Syrie, le Liban entre actuellement dans son champ d’action en raison du vide laissé par Ortagus, dont le remplacement par l’administration américaine n’est pas attendu avant septembre, voire plus tard.

À Baabda, il a réaffirmé l’importance de la souveraineté de l’État libanais, en particulier concernant le monopole de l’usage des armes. Il a semblé comprendre l’appel du président Joseph Aoun pour un retrait israélien, mais n’a donné aucune garantie en retour, se contentant d’écouter attentivement.

Cette posture d’écoute s’est poursuivie à Aïn el-Tiné, où, devant le président du Parlement Nabih Berri, Barrack a averti que toute implication du Hezbollah dans la guerre entre Israël et l’Iran risquait d’exposer le Liban à un nouveau conflit. Il a demandé que le dossier de l’armement soit traité rapidement, sans imposer de délais précis, mais en laissant entendre qu’une résolution accélérerait l’aide internationale au Liban.

Alors que le monde a les yeux rivés sur l’escalade entre Israël et l’Iran, les priorités américaines semblent quelque peu brouillées. Toutefois, la sécurité d’Israël reste une constante. C’est dans cette optique que la visite de Barrack peut être perçue comme un avertissement : éloigner le Hezbollah de la guerre pour éviter une reprise des hostilités contre le Liban.

Cet avertissement, soulignons-le, n’est pas le premier. Le Hezbollah a déjà reçu plusieurs messages similaires de la part d’envoyés internationaux, notamment américains, qui cherchent à obtenir des garanties contre son implication directe.

Barrack a laissé une impression globalement positive chez Berri. Contrairement à Ortagus, il n’était pas provocateur. Il a écouté attentivement et s’est montré intéressé par l’approche de Berri concernant la démarcation des frontières, que ce dernier considère comme achevée.

Malgré cette journée libanaise, le contexte régional — centré sur la guerre en Iran et ses multiples conséquences — a largement éclipsé la visite. Les craintes d’une nouvelle provocation israélienne au Liban restent vives.

La mission de Barrack s’inscrivait dans une logique exploratoire, centrée sur deux axes : le désarmement et les relations syro-libanaises. Le message adressé à Beyrouth est clair : se tenir à l’écart du dossier iranien et coopérer davantage sur la question des armes.

L’intérêt américain pour le Liban semble s’éroder, mais les avertissements demeurent. Plusieurs émissaires internationaux ont transmis le même message : éviter la guerre et maîtriser l’arsenal du Hezbollah. De son côté, le parti observe attentivement l’évolution de la situation en Iran, tout en évitant de fournir un prétexte à Israël. Mais qui peut garantir qu’Israël ne poursuivra pas son escalade ?

L’envoyé américain n’a offert aucune garantie concernant un retrait israélien ou un arrêt des frappes. Il a dispensé des conseils, formulé des souhaits, puis est reparti. La scène régionale reste complexe, sans réponses claires quant à l’intervention éventuelle des États-Unis dans le conflit ou à l’état des négociations avec l’Iran — des dossiers pourtant décisifs dans une région au bord de l’embrasement.