Aucun observateur attentif à l’évolution des événements au Moyen-Orient ne peut dissocier le sort de la bande de Gaza de celui du Liban, ni ignorer à quel point l’issue du premier influencera inévitablement le second — que ce soit en temps de paix ou de guerre. La crise libanaise est désormais directement liée à un large consensus régional et international — arabe, occidental et islamique à la fois — selon lequel les armes du pays doivent être strictement placées entre les mains de l’autorité légitime représentée par l’État et son gouvernement, à travers le Conseil des ministres.
Israël, pour sa part, insiste pour traiter Gaza et le Liban comme deux fronts distincts, avertissant qu’il s’attaquera à l’arsenal du « Hezbollah » une fois le dossier de Gaza réglé selon les étapes du plan du président américain Donald Trump. Cependant, la communauté internationale et arabe — dirigée par les États-Unis et l’Arabie saoudite — maintient le Liban sous étroite surveillance, presque dans les « soins intensifs », afin de lui éviter la confrontation militaire. Cette stratégie repose sur deux axes parallèles : exercer une pression politique sur l’Iran pour qu’il remette les armes du « Hezbollah », et fournir un soutien financier et logistique à l’armée libanaise. Le premier signe concret de ce soutien est apparu avec la subvention américaine de 230 millions de dollars destinée aux institutions militaires libanaises. Une fois la phase de désarmement entamée, viendront la reconstruction, l’aide et les investissements.
Ce même cadre arabo-international guide également les négociations sur Gaza lors des pourparlers de Charm el-Cheikh, auxquels participent désormais non seulement les États arabes mais aussi des pays musulmans comme la Turquie — tous œuvrant à la réussite du plan de Trump pour Gaza et, par extension, à l’avenir du règlement libanais. Auparavant, les discussions se limitaient à cinq parties : Israël, le Hamas, l’Égypte, le Qatar et les États-Unis. Aujourd’hui, presque tous les pays sont impliqués, par leur présence ou leur soutien, marquant une convergence arabo-islamique-internationale sans précédent, appelée à s’étendre prochainement au dossier libanais. L’Iran, cherchant à sortir de son isolement, a même rejoint ce consensus, apportant publiquement son appui à l’initiative de Trump.
La précipitation de Téhéran pour obtenir une place — fût-elle symbolique — à la table des négociations s’est répercutée au sein du « Hezbollah ». La direction du parti a dû revenir sur ses pas après que son secrétaire général adjoint, le cheikh Naïm Qassem, a rejeté hâtivement le plan. Le « Hezbollah » a ensuite publié un communiqué s’alignant sur la position du Hamas, qui avait accepté le projet de règlement. Cette confusion au sein du parti reflète les hésitations de Téhéran lui-même, les deux cherchant à éviter une vaste frappe israélienne déjà annoncée par des assassinats ciblés et des attaques de précision contre des sites d’armes et d’entraînement au Sud-Liban et dans la Békaa.
Des témoignages en provenance de son propre environnement indiquent que des remises limitées d’armes et de positions, menées discrètement et sans couverture médiatique, auraient déjà commencé dans certaines localités de la Békaa et du Sud. Cela expliquerait le silence persistant entourant le premier rapport de l’armée libanaise au Conseil des ministres sur l’avancement du plan de désarmement. Selon des fuites, quelques sites situés au sud du Litani auraient été démantelés, tandis que la majorité reste à l’étude, signe de la réticence persistante du parti, voire de son pari sur d’éventuels changements de dernière minute lui permettant d’échapper au plan étatique.
Parallèlement, les déclarations répétées de ses dirigeants affirmant que le « Hezbollah » s’est reconstruit militairement et organisationnellement, et qu’il est prêt à combattre à nouveau, offrent à Israël un prétexte supplémentaire devant la communauté internationale — et devant le comité du « mécanisme » — pour justifier une éventuelle nouvelle opération militaire. L’absence de toute sympathie mondiale envers l’Iran et son bras libanais, à l’inverse du large élan de solidarité envers Gaza, ne fait que renforcer ce risque.
Entre ces manœuvres concurrentes — politiques et militaires, régionales et locales — le Liban se trouve aujourd’hui mis en « quarantaine » temporaire, arabo-islamique et internationale. Tel un patient mis en isolement médical, le pays attend d’être transféré vers une salle de rétablissement — délivré de la rhétorique des « victoires » proclamées sur un poteau ou sur un rocher.
Selon les membres des délégations soutenant le Premier ministre Nawaf Salam, cette période de quarantaine ne devrait pas durer : la sortie du Liban est prévue d’ici quelques semaines, et non quelques mois. Les tentatives d’exploiter d’éventuelles divergences entre le président Aoun et Salam, ou de se concilier les faveurs de la direction de l’armée, ne changeront rien à ce qui a déjà été écrit, décidé et scellé. Ce que le discours d’investiture, la déclaration ministérielle et la résolution d’août ont uni sous le regard arabe et international ne saurait être défait par un agitateur s’appuyant sur des armes illégitimes.
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