L’envoyé présidentiel français Jean-Yves Le Drian prépare deux conférences internationales destinées à soutenir le Liban. La première sera consacrée au renforcement de l’armée libanaise, afin de lui permettre d’assumer ses missions nationales — notamment après la décision du gouvernement de limiter la détention des armes aux seules institutions militaires et sécuritaires légitimes. La seconde, attendue avant la fin de l’année, portera sur la relance économique, le développement et la reconstruction.

Des conditions internationales : réformes et souveraineté

Les pays ayant annoncé leur participation ont fixé trois conditions principales : le désarmement de toutes les factions armées illégales ; l’adoption de réformes attendues depuis longtemps dans les domaines économique, financier, monétaire et judiciaire ; et un meilleur contrôle des frontières orientales et septentrionales avec la Syrie.

De Paris 1 à « Cèdre »

Le soutien structuré de la France au Liban remonte à la conférence Paris I en 2001, sous la présidence de Jacques Chirac. Avec une dette publique atteignant 151 % du PIB et une croissance réduite à 1,2 %, Paris 1 avait promis 500 millions d’euros d’aides et de prêts concessionnels, conditionnés à des réformes structurelles : modernisation de l’économie, privatisations, rationalisation des dépenses, augmentation des recettes et stabilisation du système financier et monétaire.

Ont suivi Paris II en 2002 et Paris III en 2007, avant la conférence « Cèdre » de 2018, centrée sur le financement des infrastructures. Mais la plupart des réformes promises par les gouvernements libanais n’ont pas été appliquées, entravées par les blocages politiques, la corruption et l’instabilité sécuritaire.

Volet militaire et économique

La conférence dédiée à l’armée vise à renforcer ses capacités en matière d’équipements, de formation et de soutien logistique — particulièrement face aux défis sécuritaires croissants dans le sud du pays. Lors d’une rencontre similaire à Paris en octobre 2024, les bailleurs avaient promis 200 millions de dollars à l’institution militaire.

La conférence économique et de développement doit, elle, s’attaquer à la relance d’une économie exsangue, frappée par l’effondrement financier, la pauvreté galopante et l’effondrement de la monnaie nationale. L’an dernier, une conférence à Paris avait alloué 800 millions de dollars à l’aide humanitaire.

Des exigences difficiles à satisfaire

Outre l’application de la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies et le monopole de l’État sur les armes, les donateurs exigent des réformes profondes, notamment dans les secteurs bancaire et judiciaire, mais aussi fiscales et administratives, afin de renforcer la transparence et de lutter contre la corruption. La France l’a clairement affirmé : sans réformes, pas de soutien économique.

Les bailleurs exigent également un contrôle effectif des frontières avec la Syrie, ce qui suppose une coopération sécuritaire et technique pour lutter contre la contrebande et délimiter officiellement les frontières. Paris a d’ailleurs fourni une aide technique comprenant cartes et documents datant du mandat français.

Jusqu’ici, le Liban peine à satisfaire ces conditions. L’armée a commencé à se déployer au sud du Litani, mais elle manque encore de moyens pour couvrir l’ensemble du territoire. Le gouvernement a adopté une position ferme sur le désarmement des groupes armés, et certaines factions palestiniennes ont commencé à remettre leurs armes. Mais le « Hezbollah » continue de refuser catégoriquement de désarmer.

Sur le plan économique, rien n’a véritablement changé depuis l’effondrement d’octobre 2019. Les mesures partielles et incohérentes ont été inefficaces, parfois contre-productives. Le chaos administratif perdure, malgré les promesses de sanctionner les contrevenants.

L’avenir du soutien face aux divergences

La France coordonne ses efforts avec les États-Unis, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Qatar, l’Égypte et d’autres alliés. Tous partagent les mêmes objectifs, mais divergent sur les moyens d’y parvenir.

Un autre obstacle est la fatigue des donateurs : les ressources mondiales sont limitées et le Liban n’est pas la seule urgence. Les pays amis rappellent que ce qu’ils exigent est avant tout une revendication des Libanais eux-mêmes : désarmement, réformes et vision commune de l’avenir du pays. Sans cela, les promesses d’aide resteront de simples promesses.