À l’approche de la prochaine session des réunions du Comité du « Mécanisme », prévue à Naqoura le 19 décembre, les regards se tournent une nouvelle fois vers la frontière libano-israélienne, à la recherche d’indices permettant de décrypter la direction des vents : une trêve durable ou une escalade dont Benjamin Netanyahou choisirait le moment.
La prochaine session réunira les deux membres civils du comité — le Libanais Simon Karam et l’Israélien Uri Resnik — aux côtés des autres membres militaires, en présence de l’émissaire américaine Morgan Ortagus, qui tient désormais les rênes de ce processus délicat, pris entre deux impératifs : contenir la tension et éviter l’effondrement.
Cette dynamique à plusieurs niveaux fait des réunions de Naqoura bien plus qu’un simple protocole technique. Elles sont devenues une plateforme américano-onusienne visant à stabiliser un rythme militaire acceptable avant la fin de l’année, fût-ce de manière provisoire.
Entre le calendrier des fêtes et l’échéance des menaces
Les réunions du « Mécanisme » interviennent à moins d’une semaine de Noël et à moins de deux semaines du Nouvel An — une période que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou avait fixée comme échéance avant de passer à une phase de « montée en puissance calculée » contre le Liban, si ce qu’il considère comme un « désengagement » libanais de l’engagement de l’exclusivité des armes aux mains de l’État sur l’ensemble du territoire devait se poursuivre.
Malgré la controverse suscitée par ces menaces, leur calendrier ne semble pas arbitraire. Netanyahou chercherait, semble-t-il, à clore une année lourde d’échecs politiques en imposant une nouvelle équation régionale, tandis que Beyrouth mise sur les « mécanismes » diplomatiques américains, européens et arabes pour réduire les risques et éviter que le pays ne soit entraîné dans une confrontation non maîtrisée.
Entre le discours d’investiture et la déclaration ministérielle
Dans ce contexte, deux trajectoires parallèles ont émergé sur la scène intérieure, constituant le socle de la position officielle de l’État. La première est le discours d’investiture prononcé par le président, le général Joseph Aoun, le 9 janvier, dans lequel il a réaffirmé sans ambiguïté devant les députés son attachement au principe de « l’exclusivité des armes » aux mains de l’État libanais, sans aucune exception. La seconde est la déclaration ministérielle du gouvernement du Premier ministre Nawaf Salam, publiée quelques semaines plus tard, qui a réitéré la même vision, érigeant le monopole de l’État sur les armes en pilier intangible de la phase de redressement institutionnel.
À travers cette dualité présidentielle et gouvernementale, la légitimité libanaise tente, au moins sur le plan théorique, d’ancrer un cadre pour le passage du Liban vers une ère sans tutelle — ni syrienne ni iranienne — et de clore le chapitre de « l’État parallèle » au profit d’un État unique.
Le Hezbollah entre le déni du changement et la peur du déluge
À l’inverse, la direction du Hezbollah continue de traiter les positions de la légitimité libanaise comme des « dérapages » ou des « concessions » faites aux Israéliens, dans un ton qui rappelle la rhétorique des décennies passées, lorsque le Liban était un terrain ouvert aux chevauchements de tutelles et aux décisions à double détente.
Cependant, le fait que le « parti » ignore la réalité de la transformation intervenue dans la structure de l’État libanais depuis le début de l’année — avec tout ce qu’elle implique en termes de consensus interne et de soutien externe — donne à son discours l’allure d’un propos appartenant à un autre temps, à une époque révolue dont les réalités régionales et internationales ont profondément changé.
Les règles du jeu ne sont plus celles d’hier. La couverture iranienne n’est plus la même à la lumière des évolutions récentes, et l’humeur interne libanaise n’est plus en mesure de supporter la persistance de la contradiction entre l’État et des armes échappant à son autorité.
Entre deux options… sans troisième
Dès lors, la question finale devient simple, quoique existentielle : le Hezbollah saisira-t-il le nouveau moment libanais pour prendre l’initiative de remettre ses armes à l’État, mettant un terme à une ère de quatre décennies ? Ou poursuivra-t-il une politique de temporisation, poussant le pays au bord d’un gouffre dont nul ne sortirait indemne — ni le « parti », ni l’État, ni la société ?
Aujourd’hui, l’équation laisse peu de place aux zones grises. Soit un État unique assume la décision de la guerre et de la paix, soit le Liban glisse progressivement vers une confrontation que la majorité des Libanais ne souhaitent pas… mais qui pourrait devenir leur destin tant que les armes resteront en dehors de la légitimité de l’État.
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