Le déficit commercial chronique du Liban est devenu une maladie paralysante — une maladie que l’on ne peut plus traiter avec les « antidouleurs » que constituent les tentatives d’augmenter les exportations. Le problème essentiel ne réside pas seulement dans le faible volume des exportations, mais dans l’ampleur — souvent inutile — des importations. Le profond gouffre entre les importations et les exportations avec de nombreux pays, y compris plusieurs considérés comme des États « frères » et « amis » du Liban, est devenu une caractéristique majeure de ce déséquilibre : une bête qui dévore l’économie libanaise, épuise ses réserves financières et inonde ses marchés locaux avec les produits de ces « nations amies », selon le Guide des exportations et des industries libanaises. Ce gouffre constitue également un obstacle majeur à la commercialisation de la production industrielle et agricole du Liban, tant sur le marché local qu’à l’étranger.
Les dernières statistiques du Guide des exportations et des industries libanaises, basées sur les données des douanes libanaises, montrent que la balance commerciale du Liban avec le monde a enregistré, au cours des huit premiers mois de cette année, un déficit de 10,57 milliards de dollars. À la fin du mois d’août, le Liban avait importé pour 12,936 milliards de dollars de marchandises, tandis que ses exportations ne s’élevaient qu’à 2,366 milliards de dollars.
Des importations au détriment de la production nationale
Le problème ne réside pas seulement dans l’énorme différence entre importations et exportations, mais aussi dans le fait que le Liban importe 1 021 produits d’une valeur de 5,19 milliards de dollars qui sont pourtant déjà fabriqués localement — ou ont des équivalents locaux — en quantités répondant aux normes internationales les plus élevées et suffisantes pour couvrir la demande intérieure.
À l’inverse, le Liban a exporté 1 287 produits d’une valeur de 1,924 milliard de dollars entre janvier et fin août.
Échanges avec les pays arabes
Sur le front arabe, le Liban a enregistré un déficit commercial avec 11 États arabes, le plus important étant avec l’Égypte, où le déficit a atteint 759,449 millions de dollars durant la période considérée. Viennent ensuite :
- Arabie saoudite : déficit de 675 millions de dollars
- Émirats arabes unis : déficit de 507,109 millions de dollars
En revanche, le Liban a réussi à enregistrer un excédent avec un nombre limité de pays arabes.
En tête de liste figurait l’Irak, avec un excédent de 90,266 millions de dollars, suivi de :
- Syrie : excédent de 32,994 millions de dollars
- Koweït : excédent de 16,756 millions de dollars
- Qatar : excédent de 10,367 millions de dollars
Échanges avec l’Union européenne et la Chine
Les échanges commerciaux avec les 29 pays de l’Union européenne ont abouti à un déficit impressionnant de 3,77 milliards de dollars, les importations totalisant 4,065 milliards de dollars contre des exportations de seulement 294,664 millions de dollars.
Fait notable : le Liban a enregistré un déficit commercial avec 139 pays, dont les principaux sont :
- Chine : déficit de 1,49 milliard de dollars
- Grèce : déficit de 1 milliard de dollars
- Turquie : déficit de 773,316 millions de dollars
Quant aux pays avec lesquels le Liban a enregistré un excédent, ils étaient au nombre de 69, dont les plus importants :
- Arabes : Irak, Syrie, Koweït, Qatar
- Africains : Côte d’Ivoire, Guinée, Ghana, Gabon
Cette réalité reflète « l’absence totale de l’État libanais — de ses ministères et autorités compétentes — depuis des décennies », selon l’analyse du Guide des exportations et des industries libanaises, ainsi que « son incapacité à entreprendre la moindre démarche permettant de tracer une voie claire pour sortir le Liban de cette crise ».
Le rapport souligne que réduire le déficit commercial nécessite des mesures simples et peu coûteuses, notamment la mise en œuvre des accords commerciaux déjà signés entre le Liban et d’autres pays. Parmi les plus importants :
l’Accord arabe de facilitation du commerce, et
l’accord commercial entre l’Union européenne et le Liban,
qui donnent au Liban le droit d’imposer des droits spécifiques sur les importations de produits qu’il fabrique lui-même — en particulier en vertu de l’article 15 de l’Accord arabe de facilitation du commerce.
Les dangers d’un déficit commercial permanent et croissant
Le danger du déficit commercial chronique et croissant réside dans son impact direct sur la balance des paiements, qui a enregistré un déficit progressif de 2011 à 2021 atteignant 35 milliards de dollars. Cela signifie que ce montant a simplement quitté l’économie libanaise à un moment où le pays avait désespérément besoin de freiner l’effondrement de la monnaie et de limiter l’aggravation des pertes.
Sans la hausse du prix de l’or au cours des trois dernières années, les politiques d’austérité du gouvernement, et les ajustements comptables adoptés par les institutions financières dans le calcul de leurs dépôts extérieurs, le déficit aurait continué à croître sans relâche.
Pour autant, l’excédent actuellement observé dans la balance des paiements n’est pas garanti ; il risque de redevenir déficitaire en raison des chocs sécuritaires, politiques et économiques croissants — et des retards persistants dans les réformes.
C’est pourquoi une action urgente est nécessaire pour réformer la balance commerciale et réduire son déficit, étant donné qu’elle constitue la plus grande composante de la balance des paiements.
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