Depuis qu'il a assumé la direction de l'armée, le président Aoun sait que la politique au Liban est corrompue et qu'elle corrompt la plupart de ceux qui la pratiquent, à l'exception de ceux d'entre eux qui ont un frein éthique inculqué dès leur plus jeune âge dans leur foyer familial, imprégné par l'école et affiné par une conscience sociale aiguë. Pour en témoigner, ces personnes existent, mais elles sont très peu nombreuses. C'est une espèce d'homme politique menacée d'extinction, non seulement au Liban mais dans le monde entier.
Depuis son élection à la présidence de la République, le général Joseph Aoun a expérimenté directement la différence considérable entre commander l'armée – une institution représentant la discipline, l'intégrité et le sacrifice pour la nation – et la présidence de la République – un poste dépouillé de la substance de ses pouvoirs par les marchandages politiques, contraint par la nécessité du partenariat parfois, sinon par l'acceptation d’un statu quo.
Par conséquent, il n'est pas surprenant que le Président se sente frustré lorsqu'il a de nombreux engagements à tenir sans avoir la capacité de les mettre en œuvre avec l'urgence requise ou la rapidité qu'il possédait lorsqu’il était encore à la tête de l'armée.
Il n'est pas surprenant non plus que le Président soit irrité par ce qu'il a appelé la « médisance des Libanais contre leurs concitoyens ». Lors de son discours devant le Syndicat des rédacteurs de la presse libanaise, le Président a ouvertement exprimé son mécontentement que des Libanais, très probablement des hommes politiques, visitent Washington D.C., la capitale de la décision mondiale, et « déversent leur venin » devant leurs interlocuteurs, à quelque niveau que ce soit, contre les politiques du gouvernement, répandant des impressions négatives sur les performances du gouvernement libanais, pour servir leurs intérêts partisans.
Il n'est pas surprenant non plus que le Président défende l'armée face aux affirmations selon lesquelles elle aurait négligé ses devoirs. Il a été clair lorsqu'il a énuméré les tâches demandées à l'armée malgré ses capacités limitées.
Nous sommes surpris que le Président soit patient à ce point, même si son élection était une nécessité, étant donné que la phase suivant l'élection est principalement une phase de sécurité qui nécessite que quelqu'un à la tête du pouvoir soit un expert des phases sécuritaires et militaires.
Nous sommes également surpris que le Président considère ce que le gouvernement a accompli comme des réalisations notables, alors que la nécessité urgente exigeait que le gouvernement soit plus rapide dans ses actions, plus décisif dans ses décisions et plus engagé envers les décisions qu'il prend et les mécanismes qu'il adopte.
Nous attendons que le Président passe de la phase du ressentiment et de la plainte à la phase de l'action. En effet, nous nous attendions à ce qu'il soit plus réaliste dans ses promesses et ses engagements, en promettant peu et en nous surprenant en réalisant beaucoup.
La situation que traverse le Liban, surtout depuis la vacance de la présidence et la prise collective des pouvoirs présidentiels par le Conseil des Ministres, est une circonstance exceptionnelle et d'urgence, particulièrement après que le « Hezbollah » a seul décidé de se suicider et d'entraîner le Liban avec lui. Cette circonstance d'urgence exige que le Conseil des Ministres maintienne ses sessions ouvertes, et non qu'il se réunisse une fois par semaine ou tout au plus deux fois dans certaines semaines.
Le Président a dit à plusieurs reprises qu'il ne voulait rien pour lui-même. Et nous croyons que l'homme public le plus fort est celui qui ne veut rien pour lui-même. Mais la prise de position seule ne suffit pas. Rappelons-nous ce qu'ont fait le président Fouad Chehab et le président Elias Sarkis lorsqu'ils ont fait face à une résistance politique à leurs programmes de réforme. Une seule décision de chacun d'eux avait forcé l'ensemble de la classe politique à déclarer son obéissance.
Et nous attendons des décisions de cette nature.
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