Il semble que la scène libano-israélienne entre à nouveau dans une phase décisive, après que l’envoyé spécial américain pour le Moyen-Orient, Tom Barrack, a adressé ce qu’il a décrit comme un « ultimatum final » au commandement de l’armée libanaise, lui accordant un délai jusqu’à la fin du mois de novembre pour entreprendre une étape réelle et concrète vers le désarmement du « Hezbollah », ou du moins pour modifier la réalité actuelle sur le terrain dans le sud du Liban.
Bien que les messages américains aient été formulés dans un langage diplomatique teinté d’ambiguïté, leur fuite dans les médias israéliens leur a donné un ton d’avertissement explicite, d’autant plus que Barrack a laissé entendre que Washington « comprendrait » toute action militaire israélienne à venir si les autorités libanaises venaient à échouer à respecter le délai fixé.
Washington fixe un délai, Tel-Aviv menace
Fait notable, ces développements ont coïncidé avec l’annonce de la FINUL, qui a signalé avoir observé plus d’une centaine de véhicules militaires israéliens se déplaçant dans le sud du Liban — un signe indiquant qu’une incursion terrestre sur le territoire libanais pourrait être imminente.
Le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a récemment présidé une réunion de sécurité consacrée au suivi des activités de reconstruction de « Hezbollah » dans le sud. Les rapports de renseignement présentés au cours de la séance ont révélé que le groupe s’emploie à faire passer des missiles à courte portée de la Syrie vers le Liban et à réhabiliter ses bases opérationnelles endommagées lors des frappes précédentes.
Parallèlement à cette escalade militaire israélienne, illustrée par des frappes répétées de drones contre des positions de « Hezbollah » dans le Sud, la Békaa et le Nord, Washington a tenu à envoyer des messages ambigus : un soutien à l’armée libanaise d’une part, et un avertissement clair contre toute lenteur dans l’affrontement avec le « Hezbollah » d’autre part.
Entre dissuasion israélienne et retenue libanaise
Du côté israélien, l’establishment militaire ne cache pas son inquiétude face à l’accroissement des capacités militaires de « Hezbollah », malgré les pertes subies ces derniers mois. Les rapports de renseignement indiquent que le groupe a partiellement réussi à reconstruire son réseau logistique, recevant des cargaisons d’armes en provenance d’Iran via l’Irak et la Syrie, tandis que les opérations de contrebande se poursuivent malgré les efforts de façade déployés par Damas et Beyrouth pour les limiter.
Dans ce contexte, les autorités israéliennes ont averti qu’« aucun endroit au Liban ne serait à l’abri » si « Hezbollah » poursuivait son réarmement, tandis que le ministre de la Défense israélien Katz a menacé explicitement que « Beyrouth ferait partie de la liste des cibles » si le groupe continuait à « jouer avec le feu ».
Le Premier ministre Netanyahou a réitéré la même position, affirmant qu’Israël « ne permettra pas de transformer le Liban en un nouveau front », indiquant clairement la volonté de Tel-Aviv de maintenir le niveau de l’escalade sous contrôle, sans renoncer pour autant à sa politique de dissuasion préventive adoptée depuis le début de l’année.
Beyrouth entre le marteau et l’enclume
À l’inverse, les déclarations officielles libanaises traduisent une tentative prudente d’équilibrer les pressions internationales et les impératifs de stabilité interne, notamment après que le président Joseph Aoun a appelé à adopter le dialogue et la négociation comme « langage essentiel », affirmant que la guerre n’était pas une option et que le Liban restait attaché à l’accord de novembre 2024, qui prévoit un calme durable le long de la frontière sud.
Pour sa part, le ministre des Affaires étrangères, Youssef Rajji, a souligné que le gouvernement libanais « est pleinement conscient que la solution diplomatique est la seule voie possible », rappelant la nécessité de poursuivre la mise en œuvre de l’accord de Taëf et de confier le monopole des armes à l’État, tout en réaffirmant l’importance de « neutraliser le Liban de la politique des axes » comme unique moyen d’assurer sa stabilité.
Un avertissement au bord de l’explosion
Le délai imposé par Tom Barrack semble, dans son essence, être le dernier test de la capacité du Liban à reprendre l’initiative interne avant que la frontière sud ne se transforme en champ de bataille ouvert aux conséquences imprévisibles.
Si Beyrouth parvient à réaliser des avancées concrètes dans la maîtrise des armes illégales et à réaffirmer l’autorité de l’État, elle pourrait réussir à freiner l’escalade israélienne, du moins temporairement.
Mais en cas d’échec, selon la menace implicite américaine, Washington ne s’opposerait pas à une guerre israélienne limitée pouvant s’étendre jusqu’au cœur du sud du Liban — un scénario qui suscite des craintes croissantes de voir le pays replonger dans le chaos.
C’est sans doute ce qui pousse à croire qu’entre « le délai américain » et « la menace israélienne », le Liban se retrouve aujourd’hui pris au piège d’une équation internationale complexe, où il ne dispose ni du luxe du temps ni de la capacité de manœuvrer indéfiniment.
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