Au début du mois de novembre, les propriétaires de générateurs privés dans plusieurs régions libanaises ont montré un engagement croissant envers le respect des tarifs fixés par le ministère de l’Énergie et de l’Eau — une avancée positive après des mois de facturation incohérente et de coûts exorbitants qui ont lourdement pesé sur les citoyens.
Une conformité motivée par la crainte des amendes
Selon des sources bien informées, cette conformité découle en grande partie de la crainte de sanctions que les autorités de contrôle pourraient imposer aux propriétaires de générateurs récalcitrants, surtout depuis que le ministère de l’Économie a intensifié ses inspections sur le terrain. Les factures, qui avaient flambé en octobre, ont progressivement diminué ce mois-ci, avec une correction des montants et l’adoption d’un tarif unifié.
Le tarif mensuel forfaitaire — ne dépassant pas 7 dollars pour un abonnement de 10 ampères — est désormais largement respecté, après avoir dépassé les 10 dollars dans certaines régions le mois précédent. Cet ajustement a permis d’alléger légèrement la pression financière sur les ménages.
Une crise électrique persistante
Depuis l’effondrement financier du Liban en 2019, les générateurs privés sont devenus un véritable cordon de survie pour assurer l’électricité aux citoyens, après la défaillance d’Électricité du Liban (EDL) dans la production et la distribution.
Ce secteur a traversé plusieurs phases :
- La phase du chaos (2019–2021) : marquée par l’absence de supervision et des écarts de prix considérables entre les régions.
- La phase de tarification officielle (2022) : lorsque le ministère de l’Énergie a commencé à publier des tarifs mensuels prenant en compte le prix du mazout et le taux de change.
- La phase de contrôle et de sanctions (2023–2025) : au cours de laquelle le ministère, en coordination avec les municipalités, a entrepris de réguler les prix.
Malgré ces efforts, les Libanais restent otages de deux factures : l’une symbolique, payée à l’État, et l’autre — bien plus élevée — versée aux propriétaires de générateurs privés.
Des alternatives : l’essor de l’énergie solaire
Face à la persistance de la crise électrique et à la hausse du coût des générateurs, le Liban a connu au cours des deux dernières années une véritable explosion du recours à l’énergie solaire.
Entre 2022 et 2024, le nombre de systèmes solaires installés a augmenté de plus de 250 %, selon les estimations de sociétés énergétiques locales. Ces installations ont permis de réduire la pression sur le réseau public et sur les générateurs privés, mais elles restent coûteuses à l’installation : le prix d’un système domestique varie entre 2 500 et 6 000 dollars, selon la capacité, ce qui le rend inabordable pour de nombreuses familles.
Le coût de l’électricité comparé à la région
D’après les données de la Banque mondiale, les ménages libanais paient aujourd’hui l’un des tarifs d’électricité les plus élevés de la région, si l’on tient compte du coût de l’électricité issue des générateurs privés — entre 35 et 40 cents par kilowattheure, contre :
- Égypte : environ 7 cents/kWh
- Jordanie : environ 10 cents
- Turquie : entre 12 et 15 cents
Cet écart reflète l’absence de production nationale stable, le coût élevé du carburant, ainsi que la faiblesse des infrastructures et de la maintenance du réseau.
Une avancée, mais pas une solution
L’expert en énergie Dr Rabih Nasr a qualifié la conformité des propriétaires de générateurs aux tarifs officiels de « signe positif témoignant d’une volonté d’organiser le secteur, mais pas d’une solution à la crise ».
« La véritable solution réside dans la relance efficace des centrales publiques et dans l’investissement dans les énergies renouvelables », explique Nasr. « Les Libanais ne peuvent pas rester prisonniers du marché noir de l’électricité. »
Il ajoute :
« Si la transition vers l’énergie solaire se poursuit, qu’elle soit encadrée légalement et reliée au réseau national, le Liban pourrait produire d’ici cinq ans près de 40 % de ses besoins électriques à partir de sources propres, réduisant progressivement le coût de l’électricité pour les consommateurs. »
La conformité accrue des propriétaires de générateurs ce mois-ci constitue sans aucun doute une avancée dans la bonne direction, mais elle ne saurait masquer la profondeur de la crise électrique au Liban, qui dépasse depuis longtemps le cadre technique pour devenir un problème de gouvernance et de gestion.
En l’absence d’un plan énergétique national intégré, l’énergie solaire demeure aujourd’hui la solution la plus réaliste, tandis que les citoyens attendent toujours des initiatives étatiques sérieuses qui les placeraient enfin du côté des bénéficiaires, et non des éternelles victimes du système énergétique.
Prière de partager vos commentaires sur:
[email protected]
