Les relations entre les États-Unis et le Venezuela se détériorent de plus en plus. Le président Donald Trump a ordonné des préparatifs militaires dans les Caraïbes et le Pacifique après avoir autorisé la CIA à mener des opérations secrètes sur le sol vénézuélien. Des fuites provenant de la Maison-Blanche et du département de la Guerre évoquent la possibilité d’utiliser des missiles de croisière Tomahawk contre le Venezuela. Le Sénat n’a pas réussi à bloquer de nouvelles frappes, que le député Adam Schiff (D-Californie) a qualifiées « d’inconstitutionnelles ».

Ces relations américano-vénézuéliennes ont toujours été tendues, surtout depuis le tournant du siècle, marquées par des confrontations politiques, des sanctions économiques et des affrontements idéologiques. Leur détérioration s’enracine dans la transition du Venezuela vers le socialisme sous Hugo Chávez et Nicolás Maduro, perçue par Washington comme une source d’instabilité, aggravée par les accusations vénézuéliennes d’ingérences américaines et de soutien à l’opposition.

Historiquement, Washington cherchait à maintenir des liens commerciaux solides avec le Venezuela, notamment dans le domaine pétrolier. Mais cette alliance s’est brisée lorsque Caracas a adopté une posture de confrontation privilégiant la souveraineté nationale plutôt que l’alignement sur les intérêts américains.

Pourquoi les relations américano-vénézuéliennes se sont-elles dégradées ?

Les relations se sont considérablement détériorées après l’arrivée de Chávez au pouvoir en 1999, les États-Unis critiquant les tendances autoritaires croissantes du Venezuela, la manipulation des institutions démocratiques et les violations des droits de l’homme. Les tensions se sont aggravées sous Nicolás Maduro, en particulier lors de la crise présidentielle de 2019, lorsque l’administration Trump a reconnu l’opposant Juan Guaidó comme président intérimaire. De plus, l’implication présumée du Venezuela dans le trafic de drogue et l’exploitation minière illégale, perçues comme des activités criminelles, a encore envenimé les relations.

Les menaces de Trump sur la guerre contre la drogue et le Venezuela

Le président Trump a explicitement lié la lutte contre les trafiquants de drogue à une éventuelle action militaire contre le Venezuela. Cette année, il a menacé publiquement d’étendre les frappes contre les navires soupçonnés de transporter de la drogue, dans le cadre des efforts visant à démanteler les cartels opérant sur le territoire vénézuélien. Ces menaces reposent sur un double objectif : combattre le trafic de drogue, en particulier la cocaïne, et exercer une pression stratégique sur le régime de Maduro, accusé par Washington d’abriter des réseaux criminels menaçant la stabilité régionale.

Les alliés du président soutiennent une éventuelle intervention militaire, affirmant que Maduro « abrite un nexus entre Hezbollah et les cartels de la drogue », susceptible de devenir un centre d’attaques futures contre les intérêts américains.

Les implications d’une action militaire

Une intervention militaire américaine au Venezuela entraînerait d’importants risques et des conséquences imprévisibles. Historiquement, ce type d’opérations produit souvent une instabilité prolongée, une réaction hostile de la région et des crises humanitaires inattendues. Une invasion, bien que peu probable, ou des frappes militaires prolongées pourraient galvaniser le sentiment anti-américain en Amérique latine, renforcer la légitimité de Maduro parmi ses partisans et provoquer un élargissement du conflit. Des pertes civiles et des perturbations économiques pourraient retourner l’opinion publique contre la politique américaine et engendrer un isolement diplomatique.

Résultats et perspectives futures

Une intervention militaire risquerait d’ancrer davantage l’autoritarisme, de susciter une insurrection et de transformer le Venezuela en État paria, à l’image de l’Irak ou de la Libye. À l’inverse, le maintien des sanctions économiques et des opérations secrètes pourrait déstabiliser davantage le régime sans provoquer de changement, aggravant la crise humanitaire et les flux migratoires régionaux.

À l’avenir, les relations entre Washington et Caracas alterneront probablement entre influence clandestine destinée à affaiblir Maduro et efforts diplomatiques visant à rétablir un certain dialogue, selon l’évolution politique interne du Venezuela. En somme, la trajectoire actuelle annonce un affrontement durable plutôt qu’une résolution décisive, les stratégies américaines étant façonnées par les dynamiques régionales, la politique intérieure et la lutte contre le narcotrafic, l’autoritarisme et l’influence chinoise ou russe en Amérique latine.

Légalité des frappes militaires

La légalité des frappes américaines sur le territoire vénézuélien, notamment celles visant des bateaux ou groupes liés au trafic de drogue, demeure profondément contestée en droit international et en droit interne américain. Les arguments reposent sur l’interprétation de la Charte des Nations unies, le droit à la légitime défense, la souveraineté, la nature des cibles et l’autorisation de recourir à la force.

L’article 2 de la Charte interdit l’usage de la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’un État, sauf en cas de légitime défense (article 51) ou d’autorisation du Conseil de sécurité. Caracas et de nombreux juristes considèrent que les frappes américaines violent la souveraineté du Venezuela, faute de consentement ou de mandat onusien.

L’administration américaine tente de justifier ces actions en qualifiant les organisations de trafic de drogue de groupes armés terroristes menaçant la sécurité nationale, s’appuyant sur des précédents établis après le 11 septembre. Mais les cartels, bien que criminels, ne sont pas des belligérants au sens du droit international.

Sur le plan interne, la Constitution américaine confie au Congrès le pouvoir de déclarer la guerre. L’administration Trump a toutefois mené ces frappes sans autorisation spécifique du Congrès, telle qu’une AUMF sur le Venezuela. Le recours à la force létale sans déclaration de guerre soulève donc des questions constitutionnelles sur l’excès de pouvoir exécutif.

Enfin, la qualification des personnes visées constitue un autre point litigieux : en les désignant comme « combattants illégaux » ou terroristes, Washington tente d’invoquer le droit international humanitaire, mais les experts estiment qu’une telle qualification ne suffit pas à en faire des cibles légitimes.

Ce paysage juridique complexe illustre le caractère controversé et fragile de la campagne militaire de Trump contre le Venezuela, et met en lumière les répercussions diplomatiques et juridiques qu’elle pourrait engendrer.