Ce bouillonnement diplomatique à Beyrouth, avec son solide contenu politique et sa dense présence sécuritaire et militaire, n’est pas fumée sans feu, ni motivé par de simples missions de reconnaissance, de surveillance, ou par l’étiquette et les échanges de courtoisie, il est plutôt tissé de conseils et d’avertissements, sur le postulat que « la tempête souffle deux fois, trois fois, et plus encore. »
Il est vrai que l’envoyée américaine Morgan Ortagus, le général égyptien Hassan Rashad, ensuite l’ambassadeur américain Thomas Barrack, le responsable saoudien Yazid ben Farhan, le nouvel ambassadeur Michel Issa, aux côtés de la Ligue arabe, de Paris, de Doha, d’Ankara et même de Damas, ne sont pas, et n’ont pas été, porteurs d’une épée brandie à l’encontre du Liban ou spécifiquement de «Hezbollah». Ils ne menacent pas d’une guerre écrasante, ni n’apportent un ultimatum israélien définitif, et pourtant ils exposent devant les responsables libanais et devant «Hezbollah», et derrière lui l’Iran, la vérité nue et l’unique option.
La vérité est que le Liban ne peut revenir à aucune phase antérieure de sa crise, et surtout pas à l’époque où les armes de «Hezbollah» dominaient l’État et usurpaient son pouvoir de décision souveraine. La seule option est un règlement pacifique par la voie des négociations, qui exige le courage d’abandonner deux idées reçues profondément ancrées : la distinction traditionnelle vide entre «direct et indirect», et le slogan désormais dévalorisé «le Liban sera le dernier à signer».
En dehors de ce choix et de cette vérité, les autres crises du Liban, politiques, économiques, sociales et de reconstruction, tournent en rond, attendant la seule solution viable, une convergence des volontés arabes, islamiques et internationales, à l’instar d’un règlement pour Gaza comme modèle à suivre.
La ramification des crises libanaises au cours des 56 dernières années (depuis l’accord du Caire de 1969) n’a été que le résultat de la crise mère, l’enlèvement de la décision libanaise sous trois tutelles successives et héritées, palestinienne, syrienne, puis iranienne, qui ont maintenant atteint leur apogée et dont le déclin est arrivé, grâce à un large parrainage extérieur et à une volonté interne décisive. C’est la première fois en six décennies que les efforts de toutes ces parties se réunissent, dans la complémentarité et la solidarité, pour aider le Liban.
Ce qui ouvre la perspective d’une solution, c’est que toutes les autres options ont échoué et se sont effondrées, en particulier l’option de la guerre, des armes et de la «résistance». Ceux qui défendent cette option ne possèdent plus de justification convaincante pour leurs armes. Peut-être que la dernière justification circulante, et sans doute la pire et la plus dangereuse, propagée dans le milieu de «Hezbollah», est la suivante : ils nous tueront et nous extermineront dans les deux cas, que nous renonçions aux armes ou non, donc nous devons les conserver pour nous défendre.
De toute évidence, cette équation suicidaire, qui a remplacé toutes les formules antérieures échouées telles que «soutien», «unité des fronts», «la parole est au champ de bataille», «libération de la Galilée et de Jérusalem», et «rayer Israël», complique d’une part la décision de l’État de monopoliser les armes, d’autre part elle excite l’appétit d’Israël à achever ce qu’il a fait, fait et active, et, troisièmement, elle sape l’effort international et arabe pour sauver le Liban. De plus, elle trompe les gens et les trahit.
Une prise de conscience soudaine peut encore survenir sous la forme d’un «conseil» iranien pour extraire la direction de «Hezbollah» de son calcul suicidaire et la convaincre que la peur de l’anéantissement n’est ni réaliste ni logique, au regard de deux faits :
— la survie du peuple de Gaza grâce à la solution politique et à la phase finale qui comprend le désarmement du Hamas et la levée de son contrôle, associée à une protection réelle de la population assurée par une formule de gouvernance palestinienne, arabe et internationale durable ;
— et la légitimité de l’État libanais ici, comme dernier refuge contre l’élimination, le déplacement et l’anéantissement, et comme seule autorité capable d’assurer la stabilité et la reconstruction.
Au lieu d’effrayer sa base par la menace d’anéantissement, «Hezbollah» devrait la rassurer quant à la justice de l’État et au patriotisme de l’armée libanaise, et lui expliquer que l’attachement à la légitimité n’est pas une faiblesse, car la véritable force consiste à appartenir à l’abri large de la légitimité internationale et non à un axe étroit, surtout après qu’il est apparu que ses armes étaient la source réelle de faiblesse et la cause de la mort, des déplacements et de la destruction.
À l’approche du dernier mois de la première année de l’accord de «cessation des hostilités», qui a commencé à être appliqué le 27 novembre 2024, la série d’opportunités accordées au Liban arrive à son terme, et nous sommes devant notre dernière chance contenue dans les mallettes des diplomates, réductible à un seul appel :
Dirigeants, allez aux négociations sans complexes, pour sauver le Liban de son désespoir, le peuple de sa misère et «Hezbollah» de lui-même.
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