Le sentiment que « le monde va mal » résonne profondément dans nos sociétés contemporaines, reflétant une convergence de crises interconnectées qui touchent à la fois les sphères économiques, sociales, environnementales, politiques et technologiques.
Cette perception prend de l’ampleur : le face-à-face entre les démocraties et les « démocratures » redessine un monde multipolaire dans lequel les pays du Sud Global se dressent face aux pays Occidentaux. Le modèle de ces derniers, malgré toutes ses promesses historiques, n’a pas pu combattre efficacement la pauvreté et les inégalités. «L’illiberalisme » est finalement l’aveu des échecs du « capitalisme libéral » qui a longtemps fait de la « défense des droits de l’Homme », son paravent le plus visible et le plus acceptable. Derrière lui, le capitalisme a construit un système de rentabilité et de ponction qui foulait au pied l’humanisme universel qu’il prétendait combattre.
Or, l’économie mondiale est marquée par une concentration croissante des richesses. Selon les rapports l’association Oxfam, 1 % de la population mondiale détient plus de la moitié des richesses globales, tandis que des milliards de personnes vivent sous le seuil de pauvreté. La pandémie de COVID-19 a accentué cette fracture : les plus riches ont vu leurs fortunes croître grâce à la hausse des marchés boursiers et des investissements technologiques, tandis que les travailleurs précaires, notamment dans les pays en développement, ont perdu leurs moyens de subsistance. L’inflation, exacerbée par des crises comme la guerre en Ukraine, a renchéri le coût de la vie, rendant l’accès à l’alimentation, au logement et à l’énergie de plus en plus difficile pour les classes moyennes et populaires. Cette polarisation économique alimente un ressentiment social, souvent exploité par des mouvements populistes.
Les tensions géopolitiques et conflits secouent le monde comme jamais. La guerre en Ukraine, sur laquelle Trump semble se casser les dents, déclenchée en 2022, a non seulement causé des pertes humaines massives, mais aussi perturbé les chaînes d’approvisionnement mondiales, notamment en énergie et en céréales, accentuant la crise alimentaire dans des régions comme l’Afrique de l’Est.
Au Moyen-Orient, les tensions persistantes, notamment entre Israël et ses voisins, continuent de générer des cycles de violence et d’instabilité. Par ailleurs, la rivalité croissante entre grandes puissances, comme les États-Unis et la Chine, se manifeste dans une course aux armements, des guerres commerciales et des luttes pour le contrôle des ressources stratégiques (terres rares, semi-conducteurs). Ces tensions géopolitiques, combinées à la prolifération des armes nucléaires et des cyberattaques, font craindre un retour à une logique de blocs, rappelant la Guerre froide.
Nous ne vivons pas des crises conjoncturelles dont l’accumulation serait nouvelle. Nous changeons de monde poussé par une nouvelle révolution industrielle, celle du numérique et de l’IA. Rien, ni aucun secteur ne résistera au changement de paradigmes imposé par l’Intelligence Artificielle.
Le changement climatique est sans doute le défi le plus pressant. Les rapports du GIEC soulignent que le réchauffement planétaire approche dangereusement du seuil critique de 1,5 °C, avec des conséquences déjà visibles : vagues de chaleur extrêmes, inondations, sécheresses et fonte accélérée des glaciers. En 2025, des événements comme les mégafeux en Australie ou les inondations en Asie du Sud ont déplacé des millions de personnes, tandis que des régions entières, comme certaines îles du Pacifique, risquent de devenir inhabitables. Les populations les plus pauvres, bien qu’elles contribuent le moins aux émissions de CO2, en subissent les pires impacts, ce qui renforce les injustices environnementales. Malgré les engagements de la COP, les efforts pour réduire les émissions restent insuffisants, freinés par des intérêts économiques liés à la recherche du profit.
Le résultat politique de ces horizons multi-factoriels confus et troublés est visible : nos sociétés sont de plus en plus divisées, fracturées et communautarisées. La montée des populismes, tant à droite qu’à gauche, traduit une défiance croissante envers les élites et les institutions traditionnelles, qu’il s’agisse des gouvernements, des médias ou des organisations internationales. Les élites n’ont pas changé la vie des peuples. Elles les ont assujettis à leur pouvoir unilatéral.
Ces tensions exacerbées alimentent l’affrontement, pour l’instant à distance, de l’Occident et du Sud Global. Le premier camp a régné sans partage pendant des siècles au nom de la démocratie. Et cela grâce à ses élites intellectuelles et militaires. Le second camp attend son heure, certain que les valeurs occidentales n’ont pas su imposer un système juste et équitable. La fin de la « guerre froide » entre les Etats-Unis et l’Union soviétique a été remplacée par une nouvelle confrontation planétaire.
Prière de partager vos commentaires sur:
[email protected]