À peine le président avait-il annoncé la disposition du Liban à négocier avec Israël qu’une avalanche de questions, de cadres et de conditions hypothétiques a surgi. Certains sont même allés jusqu’à soulever la question des prérogatives constitutionnelles — qui est réellement habilité à négocier — malgré la clarté de l’article concerné. Le message du président était sans équivoque : le Liban ne peut pas rester à l’écart du cours que prend toute la région. Après tout, les négociations se déroulent entre adversaires et non entre amis — du moins pas le type de négociations dont il parlait.
Ce débat rappelle un précédent vieux de près de cinquante ans, lorsque le président égyptien de l’époque, Anouar el-Sadate, déclara sa volonté d’œuvrer pour la paix et même de se rendre en Israël pour y parvenir. À l’époque, la plupart des Arabes traitèrent Sadate de traître, mais la véritable controverse portait sur la nature de la paix jugée acceptable : certains parlaient d’une paix partielle, d’autres d’une paix globale, certains réclamaient la « paix des braves » et d’autres encore la « paix juste ». Finalement, l’Égypte ouvrit la voie à la paix avec Israël. L’Organisation de libération de la Palestine suivit les accords d’Oslo, puis la Jordanie avec le traité de Wadi Araba, avant les Accords d’Abraham. Aujourd’hui, la Syrie — autrefois le « cœur battant du nationalisme arabe » — emprunte à son tour le chemin de la paix avec Israël, par le biais de négociations directes.
Un débat parallèle se déroule désormais au Liban. Sous quelle forme doivent se tenir ces négociations ? Des pourparlers directs sous l’égide de l’ONU ? Des pourparlers indirects, parrainés par les États-Unis ? Ou bien une formule hybride sous double parrainage ? Et quel doit être le rang du chef de la délégation, et qui en seront les membres ? Tous, y compris le « Hezbollah », se sont empressés d’affirmer qu’ils soutenaient des négociations indirectes.
En admettant que ce consensus soit sincère, une question demeure : sur quoi allons-nous réellement négocier ? Le président a déclaré vouloir parvenir à l’application de la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l’ONU. Cela signifierait confiner les armes aux seules forces militaires et de sécurité légales du Liban, démanteler toutes les structures armées non étatiques, quelle que soit leur appellation, et mettre un terme aux raids israéliens afin de permettre au Liban de préparer la reconstruction.
Mais l’expérience montre qu’Israël vise bien plus que la simple application de la résolution 1701. Le Liban pourrait être prêt à franchir ses barrières idéologiques, mais cela ne suffirait pas. Toute décision d’engager des négociations doit reposer sur des études de faisabilité indiquant clairement ce que le Liban retirerait de la paix et ce qu’Israël en gagnerait. Les Israéliens savent parfaitement ce qu’ils veulent : avant tout leur sécurité, puis viennent les considérations économiques et commerciales. Mais savons-nous, nous, ce que nous voulons ? Savons-nous où nous nous situons dans le calcul des gains et des pertes ?
Il ne reste qu’à espérer que le président a fondé sa position sur des études sérieuses qui lui auraient été soumises, capables de distinguer les méandres entre le blanc et le noir.
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