À la suite de l’accord de Gaza, tous les signaux indiquent que le Liban est entraîné dans l’orbite des règlements régionaux, avec des préparatifs déjà en cours en vue de négociations potentielles avec Israël. Cette trajectoire a été renforcée lorsque le président, peu après que le président américain Donald Trump a salué son approche, a déclaré : « Nous ne pouvons pas rester en dehors du processus de règlement des crises dans la région. Nous devons en faire partie, car il n’est plus possible de supporter davantage de guerre, de destruction, de morts et de déplacements. »
Pourtant, les récentes consultations du Premier ministre Nawaf Salam avec le président et le président du Parlement Nabih Berri ont révélé une « concurrence feutrée » entre le chef de l’État et le chef du gouvernement sur la gestion de cette étape délicate. La rivalité s’est accentuée après que Trump, dans son discours devant la Knesset israélienne, a exprimé son soutien au « nouveau président libanais dans son plan de désarmement du ‘Hezbollah’ et de construction d’un État vivant en paix avec ses voisins, notant qu’il fait un très bon travail. »
Cette compétition émergente pourrait ouvrir un débat sur les prérogatives constitutionnelles. L’article 52 de la Constitution libanaise accorde au président le pouvoir de négocier et de conclure des traités internationaux « en accord avec le Premier ministre », tout en précisant que ces traités ne deviennent contraignants qu’après approbation du Conseil des ministres. Le Premier ministre Salam s’est appuyé sur cette disposition pour affirmer son rôle de partenaire dans la conclusion des traités, soulignant que le président ne peut agir seul. En définitive, aucun des deux exécutifs ne peut finaliser un accord sans l’aval décisif du Conseil des ministres.
Vers une position unifiée
Face aux pressions actuelles, aucun camp n’a le luxe de querelles prolongées. Au contraire, les consultations présidentielles s’intensifient afin de forger une position nationale unifiée en prévision de tous les scénarios — en particulier des négociations indirectes similaires aux pourparlers sur la frontière maritime de 2022, menés par l’émissaire américain Amos Hochstein, qui ont abouti à un accord historique de délimitation.
Au cœur de la position libanaise se trouve la relance de l’Accord d’armistice de 1949 comme cadre stratégique, bénéficiant à la fois d’un soutien interne et d’une reconnaissance internationale. Ces pourparlers resteraient indirects et limités à la démarcation des frontières terrestres, sans s’aventurer dans des traités de paix ou une normalisation avec Israël.
Le Liban continue de défendre la frontière internationale définie par l’Accord Paulet–Newcombe de 1923, rejetant fermement la « Ligne bleue » des Nations unies comme frontière permanente. L’Accord d’armistice de 1949, signé à Ras Naqoura sous l’égide de l’ONU, demeure le seul document bilatéral contraignant entre le Liban et Israël. Il affirme explicitement que la ligne d’armistice coïncide avec la frontière internationale reconnue, ce qui en fait une référence juridique solide pour préserver la souveraineté libanaise.
La volonté de relancer le cadre de 1949 repose sur deux piliers. D’abord, les Nations unies reconnaissent encore la validité de l’accord, en le mentionnant dans plusieurs résolutions, notamment la résolution 1701 du Conseil de sécurité. Ensuite, cet accord permet au Liban de gérer son conflit et de contrôler ses frontières par l’intermédiaire de la Commission de supervision de l’armistice de l’ONU, sans nécessiter de reconnaissance politique d’Israël ni de relations diplomatiques.
De grands obstacles
Néanmoins, des défis majeurs subsistent. Israël a gelé unilatéralement l’accord après la guerre de 1967, et il n’est pas certain que Tel-Aviv accepte aujourd’hui de le réactiver. Cette position, combinée à des décennies de conflits — y compris les invasions israéliennes de 1978 et 1982, la guerre de 2006, la mise en œuvre partielle de la résolution 1701, et les hostilités en cours — constitue l’obstacle le plus important.
Pour autant, le Liban dispose d’un cadre juridique et politique bien défini : il rejette les négociations directes et la normalisation, insiste sur les frontières internationales tracées en 1923 et privilégie des pourparlers indirects sur les frontières à travers la relance de l’Accord de 1949. Cette approche lui offre une assise internationale solide sans l’obliger à des concessions politiques. Mais sa réussite dépendra en fin de compte de la volonté de la communauté internationale d’exercer une pression sur Israël pour qu’il respecte ce cadre contraignant.
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