Après des mois de retard, la plupart des chaînes de télévision libanaises se sont finalement conformées à une décision du Conseil des ministres les obligeant à payer les frais impayés au ministère de l’Information. Certaines stations ont choisi d’échelonner leurs paiements, mais ont néanmoins assuré leur engagement total à s’acquitter de ce qu’elles doivent. Cette évolution intervient deux semaines après que le ministre de l’Information, Paul Morcos, a soulevé la question lors d’une séance gouvernementale, pointant du doigt plusieurs chaînes pour leur manquement, ce qui a déclenché un processus de régularisation progressive. Selon Abdel Hadi Mahfouz, président du Conseil national de l’audiovisuel, plusieurs chaînes — dont la Lebanese Broadcasting Corporation International (LBCI) et MTV — ont déjà commencé à payer. D’autres sont encore en train de négocier des modalités adaptées à leur situation financière fragile, affaiblie par l’effondrement du marché publicitaire et par la crise économique qui sévit depuis 2019.
Impact sur les finances publiques
Les montants versés par les diffuseurs ne se limitent pas à des frais de licence ou à la location des fréquences ; ils représentent des revenus essentiels pour le Trésor public. En pleine crise financière, le refus prolongé de certaines chaînes de payer a privé l’État de ressources qui, même limitées, auraient pu contribuer à réduire le déficit. L’économiste Georges Nader a déclaré à Al Safa News : « Le retard des institutions médiatiques à s’acquitter de leurs obligations prive l’État de ressources dont il a un besoin vital. Le laxisme des années passées a créé un climat de désordre et d’inégalités, certaines chaînes bénéficiant de privilèges au détriment des finances publiques. Imposer le paiement à tous est une mesure corrective importante, mais elle doit s’accompagner de mécanismes de suivi stricts pour garantir sa pérennité. »
Comptes d’investissement et transparence financière
Au-delà des dus, le dossier des comptes d’investissement reste épineux. De nombreuses chaînes continuent de refuser de fournir des données financières transparentes sur leurs sources de financement, ce qui alimente les doutes sur la légalité de certains fonds et menace l’indépendance du secteur. Le gouvernement a chargé le Conseil national de l’audiovisuel, en coopération avec des cabinets d’audit spécialisés, d’examiner ces comptes — une démarche qui pourrait révéler l’ampleur des irrégularités dans le secteur. Mais l’opacité financière n’est pas le seul obstacle. Les alignements politiques continuent de protéger certaines chaînes de toute responsabilité, tandis que la prolifération d’opérateurs de câbles non réglementés, agissant en dehors du cadre légal, prive les chaînes autorisées d’une partie de leurs revenus.
Vers une nouvelle vision médiatique
Dans ce contexte, de plus en plus de voix appellent à l’élaboration d’une vision médiatique nationale. Celle-ci impliquerait la mise à jour des lois obsolètes, la révision du montant des frais imposés et l’ouverture à des partenariats arabes et étrangers organisés, afin de garantir un financement durable pour les médias libanais.
Une première étape, mais insuffisante
En définitive, la décision du Conseil des ministres d’obliger les télévisions à régler leurs dus constitue une mesure de réforme nécessaire. Mais sans réformes structurelles plus profondes visant à assurer la transparence, renforcer les recettes publiques et garantir la continuité du secteur médiatique, cette mesure risque de n’être qu’un palliatif temporaire dans un secteur en proie à des crises récurrentes.
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