Les partenariats public-privé (PPP) sont des accords contractuels à long terme entre les gouvernements et les entreprises privées visant à mobiliser l’expertise et le capital privés pour développer les infrastructures et améliorer les services publics. L’un des éléments essentiels des PPP est la concurrence entre les entreprises privées, qui garantit l’efficacité, ainsi que le partage des risques entre les secteurs public et privé. En s’appuyant sur les ressources du secteur privé, les PPP permettent un développement plus durable et structuré des infrastructures et des services publics. Ce modèle stimule l’investissement privé, améliore la qualité des services, répartit les risques opérationnels et allège la charge financière de l’État.

Il existe plusieurs types de PPP, classés selon les rôles des parties, la propriété des actifs et les sources de revenus. Parmi eux : Build-Operate-Transfer (BOT), Build-Own-Operate (BOO), Build-Own-Operate-Transfer (BOOT), Build-Lease-Transfer (BLT), Rehabilitate-Operate-Transfer (ROT), Design-Build (DB), Design-Build-Finance (DBF), Design-Build-Finance-Operate (DBFO), Design-Build-Finance-Maintain (DBFM), Design-Construct-Manage-Finance (DCMF), les PPP à financement par l’usager, les PPP à financement public, les contrats de gestion, les contrats d’affermage, les contrats de services, les coentreprises (Joint Ventures - JVs) et la monétisation d’actifs. Le choix du modèle optimal dépend de plusieurs facteurs, dont les exigences du projet, la répartition des risques, les besoins de financement, les objectifs, ainsi que le cadre légal et réglementaire. Cette approche permet de s’aligner sur les priorités nationales et de favoriser un développement durable des infrastructures.

Au Liban, la loi n° 48/2017 a officiellement établi le cadre des PPP et confié la supervision des projets au Haut Conseil pour la Privatisation. Plusieurs projets ont été étudiés pour être mis en œuvre via des PPP, notamment dans les secteurs des télécommunications, de la gestion des déchets, de l’extension de l’aéroport international de Beyrouth, de l’autoroute Khaldé-Nahr Ibrahim et des énergies renouvelables. Toutefois, de nombreuses tentatives ont échoué en raison de l’absence d’un cadre juridique clair, de critiques selon lesquelles les PPP servaient les intérêts des élites, de l’instabilité politique, de la corruption généralisée et de mécanismes de partage des risques peu définis.

Aujourd’hui, malgré l’existence d’un cadre juridique, les crises économiques et politiques entravent toujours l’application de la loi. En conséquence, le Liban manque des occasions cruciales pour développer ses infrastructures et services publics. L’effondrement économique conjugué aux turbulences politiques empêche l’État d’assumer ses responsabilités, notamment la réhabilitation urgente des infrastructures vitales. Dans ce contexte, les PPP apparaissent comme la solution la plus viable pour répondre aux besoins pressants des secteurs et services publics.

Parmi les types de contrats les plus adaptés à la situation actuelle du Liban figurent les accords de type « Réhabiliter-Exploiter-Transférer (ROT) ». Ceux-ci sont particulièrement efficaces pour des infrastructures telles que le port de Beyrouth et le réseau électrique national, car ils permettent de restaurer leur fonctionnalité et d’en améliorer l’efficacité. Ces contrats, de courte durée, peuvent rassurer les investisseurs privés dans un climat incertain.

Pour résoudre les défis liés aux services publics, les contrats de gestion et d’affermage offrent un point d’entrée accessible à l’implication du secteur privé dans des services essentiels comme l’eau et l’électricité. Grâce à ces accords, l’État libanais peut tirer parti de l’expertise privée pour accroître l’efficacité opérationnelle sans céder la propriété des actifs ni engager de risques financiers majeurs, ceux-ci restant à la charge du secteur privé via la perception des redevances dans les secteurs générateurs de revenus.

Par ailleurs, les contrats Build-Operate-Transfer (BOT) conviennent mieux aux projets générant des revenus en devises étrangères, tels que les extensions d’aéroports ou les télécommunications. Ces contrats offrent aux investisseurs privés un moyen clair de récupérer leurs investissements et de sécuriser leurs rendements.

La réussite de toute initiative PPP au Liban repose sur plusieurs facteurs clés : l’instauration d’un cadre réglementaire indépendant et transparent, exempt d’interférences politiques ; la stabilité politique et le respect de l’État de droit, nécessaires pour instaurer la confiance des investisseurs ; la lutte contre la corruption et l’amélioration de la gouvernance ; l’identification de projets clairs et bancables, accompagnés d’études de faisabilité rigoureuses et de mécanismes transparents ; et la résolution de la crise économique, en particulier la stabilisation de la monnaie nationale, essentielle à l’attraction d’investissements à long terme.

L’évaluation des bénéfices financiers des PPP demeure un défi au Liban en raison des incertitudes actuelles et du manque de données techniques. Néanmoins, plusieurs indicateurs peuvent aider les décideurs à en évaluer le potentiel :

- Les PPP attirent d’importants investissements privés dans les infrastructures, réduisant ainsi la pression sur les finances publiques.

- L’implication du secteur privé améliore l’efficacité de la conception, de la construction, de l’exploitation et de la maintenance, réduisant les coûts globaux.

- Les risques sont partiellement transférés au secteur privé, ce qui protège les fonds publics.

- Les modèles PPP à financement par les usagers génèrent des revenus pouvant couvrir les coûts des projets.

- Les projets d’infrastructure stimulent l’activité économique et la création d’emplois, augmentant ainsi les recettes fiscales à long terme.

- Le recours au financement privé évite d’alourdir la dette publique et contribue à réduire les engagements existants.

- Le secteur privé introduit des technologies et des méthodes de gestion innovantes, rarement disponibles dans le secteur public.

En théorie, si elles sont mises en œuvre avec transparence et bonne gouvernance, les PPP pourraient offrir au Liban des avantages financiers considérables : mobilisation de capitaux privés, amélioration de l’efficacité, transfert des risques, génération de revenus et stimulation de la croissance économique.

Simulation des gains financiers

Pour simuler l’impact financier des PPP, nous avons analysé un échantillon de secteurs propices à la collaboration avec le secteur privé : l’extension de l’aéroport international de Beyrouth, les centrales solaires, les stations de traitement des eaux usées, la réhabilitation et l’extension du port de Beyrouth, la modernisation du réseau électrique, et le développement d’un réseau national de fibre optique. Notre analyse repose sur des hypothèses techniques détaillées dans le tableau 1.


Tableau 1 : Paramètres techniques supposés (voir source d’origine).

Nous avons calculé le bénéfice net financier comme la valeur actuelle nette (VAN) totale des profits sur l’ensemble du cycle de vie de chaque projet. Les résultats montrent que tous les projets analysés sont financièrement viables, avec des VAN positives dans tous les cas. Notamment, le port de Beyrouth et le secteur de l’électricité se distinguent par leurs rendements financiers (voir graphique 1).


Graphique 1 : Valeur actuelle nette (VAN) des projets sélectionnés (Source : calculs de l’auteur)

Bien entendu, ces chiffres reposent sur des hypothèses estimées et doivent être interprétés avec prudence. Toutefois, ils donnent une image précieuse des bénéfices financiers et économiques substantiels que pourraient générer ces projets via des partenariats public-privé. En fin de compte, ces bénéfices dépendent de la mise en œuvre de réformes structurelles, de la stabilité macroéconomique, d’un cadre PPP transparent, de l’attraction de partenaires privés crédibles, et surtout d’un pouvoir judiciaire indépendant — garant principal de la réussite de ces partenariats.