Le matin du 11 août 1984, alors que le président américain Ronald Reagan se préparait à enregistrer son allocution radiophonique hebdomadaire, il lança une plaisanterie improvisée lors d'un test de son — ignorant que ses paroles allaient bientôt faire le tour du monde et semer une panique internationale, menaçant de précipiter l'humanité au bord du cataclysme.

Reagan déclara sur le ton de la plaisanterie :

« Mes chers compatriotes, je suis heureux de vous annoncer aujourd'hui que j'ai signé une loi rendant illégale l'Union soviétique pour toujours. Nous commencerons les bombardements dans cinq minutes. »

À son insu, le micro était ouvert, et ses propos, bien que destinés à être une simple plaisanterie, furent captés, diffusés, puis rapidement relayés aux autorités soviétiques — au moment même où les tensions entre les deux superpuissances nucléaires étaient à leur comble.

En 1984, les relations américano-soviétiques connaissaient leur période la plus tendue depuis la crise des missiles de Cuba en 1962, exacerbées par une course aux armements nucléaires effrénée et par l'initiative de défense stratégique surnommée « Guerre des étoiles » lancée par Reagan, qui alimentait la crainte soviétique face à la supériorité technologique américaine.

Les conséquences de cette plaisanterie ne se firent pas attendre. Les agences de presse soviétiques interceptèrent les propos et les transmirent aussitôt au Kremlin. Le dirigeant soviétique Iouri Andropov, percevant cette déclaration comme une menace déguisée, ordonna la mise en alerte de certaines unités militaires. Quant au KGB, il reçut pour mission de surveiller de près les mouvements militaires américains, redoutant un éventuel assaut.

Et si la plaisanterie n’avait pas été perçue comme telle ?

Si les responsables soviétiques n'avaient pas compris immédiatement qu'il s'agissait d'une maladresse verbale, les conséquences auraient pu être désastreuses. Une mauvaise interprétation aurait pu déclencher le protocole nucléaire de « Lancement sur alerte » (« Launch on Warning »), autorisant le tir immédiat de missiles nucléaires à la simple suspicion d'une attaque imminente.

Un tel enchaînement aurait probablement entraîné une série de tirs de missiles balistiques intercontinentaux, anéantissant les grandes capitales en quelques minutes, provoquant l'effondrement de la civilisation mondiale et causant la mort de centaines de millions de personnes dans les premières heures. La planète serait entrée dans une ère de chaos d’une ampleur jamais connue.

En définitive, cette plaisanterie, aussi légère fût-elle sur le moment, révéla à quel point la sécurité mondiale, dans les années 1980, reposait sur un équilibre extrêmement fragile.

Certains ont peut-être ri aux paroles de Reagan — mais au Kremlin, personne n’avait le cœur à sourire.