Le Liban s’est hissé cette semaine à l’avant-scène du monde spirituel, depuis le cœur même du Vatican. Dimanche dernier, le pape Léon XIV a canonisé l’évêque martyr Ignace Maloyan lors d’une cérémonie solennelle sur la place Saint-Pierre, l’honorant comme l’un des sept nouveaux saints reconnus par le souverain pontife. Cet acte dépasse le simple hommage individuel : il s’agit d’un événement spirituel et historique qui réaffirme la place du Liban sur la carte ecclésiale mondiale, consacrant son rôle durable de pont entre l’Orient et l’Occident dans la diffusion de la foi chrétienne et la promotion des valeurs humaines et spirituelles.

Le Liban au cœur de la sainteté

La canonisation de Mgr Maloyan vient couronner un long parcours de reconnaissance pour son héroïsme spirituel et son martyre. Né à Mardin en 1869, il grandit dans un milieu chrétien fervent et fit ses études au monastère de Notre-Dame de Bzommar, au Liban, où il s’imprégna de la spiritualité profonde de l’Église arménienne catholique. Ordonné prêtre en 1896, il exerça son ministère à Alexandrie et au Caire avant d’être nommé archevêque de Mardin en 1911.

Lors des massacres des Arméniens en 1915, il fut arrêté avec ses paroissiens et soumis à la torture après avoir refusé de renier sa foi, déclarant : « La foi vaut plus que la vie. » Exécuté en juin de la même année, il devint un symbole de courage et de fermeté. Le pape Jean-Paul II le béatifica en 2001, ouvrant la voie à la récente proclamation de sa sainteté par le pape Léon XIV.

Une célébration spirituelle mondiale

La cérémonie du Vatican ne s’est pas limitée au nouveau saint du Liban : elle a célébré sept nouveaux saints venus de divers continents et cultures, dont le premier saint originaire de Papouasie-Nouvelle-Guinée, le « médecin des pauvres » vénézuélien José Gregorio Hernández, trois religieuses ayant consacré leur vie aux malades et aux démunis, ainsi que l’avocat italien Bartolo Longo, revenu à la foi après une vie d’errance et fondateur du célèbre sanctuaire de Pompéi.

À travers cette diversité, l’Église catholique réaffirme l’unité de la foi au-delà des cultures, démontrant que la sainteté ne se mesure pas à la géographie, mais à l’amour, au don de soi et au service.

Un moment symbolique pour le Liban et l’Église d’Orient

La canonisation de Mgr Maloyan revêt une profonde portée spirituelle et nationale. Pour le Liban, pays confronté à des crises politiques et économiques incessantes, cet événement représente un souffle d’espérance et de continuité.

Interrogé par An-Nahar, le père Youssef Tannous, chercheur en histoire de l’Église d’Orient, a déclaré : « La canonisation de Mgr Maloyan n’est pas seulement un hommage à sa personne, mais aussi une consécration du rôle du Liban comme phare spirituel et culturel au Moyen-Orient. Malgré ses souffrances, le Liban continue de rayonner de sainteté et de foi, offrant au monde le témoignage vivant que l’espérance ne meurt jamais. »

Le père Tannous a ajouté que cet événement ravive la mémoire de ceux qui ont défendu leur foi et leur humanité face à l’oppression : « Le sang versé il y a plus d’un siècle devient aujourd’hui un appel à l’unité, à la réconciliation et à la paix, à une époque où l’Orient a plus que jamais besoin de tels symboles. »

Le Liban, terre des saints et de la mission

Cet événement historique ravive l’image du Liban comme « terre des saints », pays d’où sont nées des missions religieuses et des ordres monastiques qui ont rayonné vers l’Orient et l’Occident. De saint Charbel, sainte Rafqa et saint Nehmtallah Al-Hardini à saint Ignace Maloyan, le Liban continue de porter un message spirituel qui dépasse ses frontières, semant la foi et l’espérance à travers le monde.

En définitive, la canonisation de Mgr Ignace Maloyan est bien plus qu’une cérémonie religieuse : elle constitue un témoignage renouvelé de l’identité spirituelle profonde du Liban. En ces temps marqués par les conflits et le désespoir, le Liban élève de nouveau sa voix à travers l’un de ses fils martyrs, rappelant au monde que la sainteté demeure possible et que la foi est plus forte que la mort.