Depuis des décennies, l’autoroute de Jounieh est l’une des voies les plus encombrées et les plus essentielles du Liban — si saturée qu’elle a hérité du surnom de « route du calvaire ». Plus de 100 000 voitures y circulent chaque jour, faisant de ce tronçon l’artère principale reliant les banlieues nord de Beyrouth au sud. Après des années de retards et d’échecs, le projet tant attendu d’élargissement est enfin relancé, avec cette fois la promesse ferme de mettre un terme à une épreuve quotidienne qui dure depuis des générations.
De 2005 à aujourd’hui : un long parcours vers l’élargissement
L’idée d’élargir l’autoroute remonte à 2005, lorsque le gouvernement adopta un décret d’expropriation d’une valeur de 34 millions de dollars. En 2019, les appels d’offres furent ouverts et le chantier devait durer deux ans et demi. Mais l’effondrement financier du pays et la chute de la livre libanaise ont gelé le projet. Aujourd’hui, celui-ci renaît avec un financement d’environ 47 millions d’euros. La municipalité de Jounieh a déjà commencé à enlever les constructions illégales entre le tunnel de Nahr el-Kalb et l’échangeur de Tabarja. Selon le député Saji Atieh, président de la commission des Travaux publics, de l’Énergie et de l’Eau, les travaux débuteront officiellement fin septembre et devraient durer de six mois à trois ans.
Que comprend le projet ?
- L’élargissement de l’autoroute existante et l’élimination des empiétements illégaux.
- Le traitement des points noirs de circulation, du tunnel de Nahr el-Kalb jusqu’au pont du Casino du Liban.
- Des projets futurs d’extension de la corniche maritime pour soulager l’autoroute principale.
- Des mesures de gestion du trafic pendant les travaux, avec la possibilité d’un chantier nocturne afin de limiter les embouteillages.
Les défis : expropriations et trafic durant les travaux
Malgré les financements garantis, les principaux obstacles demeurent les expropriations non résolues et les constructions illégales. Beaucoup craignent également que les travaux n’aggravent temporairement les embouteillages, ce qui nécessitera une coordination étroite entre le ministère des Travaux publics et le Conseil du développement et de la reconstruction.
L’expert en urbanisme et transports, le Dr Rami Nassif, a déclaré à Al-Safa News : « L’élargissement de l’autoroute de Jounieh allégera la souffrance des automobilistes à court terme, mais ce n’est pas une solution stratégique à long terme. Ce qu’il faut, c’est développer un réseau de transport alternatif, incluant une autoroute côtière de Tabarja à l’ATCL, ainsi que la relance des projets de transport public et de chemins de fer. »
Investissements étrangers dans les transports : des occasions manquées
Ces dernières années, des entreprises étrangères ont manifesté leur intérêt pour les infrastructures libanaises. Des sociétés françaises et chinoises ont proposé de construire des autoroutes côtières via des partenariats publics-privés (PPP), tandis que d’autres offres incluaient la relance de la ligne ferroviaire Beyrouth–Tripoli. Mais l’instabilité politique et financière a empêché la concrétisation de ces projets.
Conclusion
Après des années d’attente, l’élargissement de l’autoroute de Jounieh semble enfin prêt à voir le jour. L’espoir est qu’elle se transforme d’un goulet d’étranglement paralysant en véritable artère économique et sociale. Mais la réussite dépendra d’une planification rigoureuse, du respect des délais et de la garantie que ce projet constitue une étape vers des solutions de transport durables — et non pas seulement un palliatif temporaire à une crise qui dure depuis des décennies.