Le Hezbollah a officiellement démenti les récentes informations de presse selon lesquelles il serait prêt à discuter de l’avenir de son arsenal. En niant l’existence de toute source allant dans ce sens, le parti rejette implicitement les spéculations croissantes sur une éventuelle ouverture au dialogue. Pourtant, le débat autour des armes du Hezbollah s’intensifie, révélant une vérité plus large : le parti ne peut plus compter sur des dynamiques locales ou régionales favorables, sauf en cas de percée dans les négociations irano-américaines — un scénario encore lointain.
La couverture politique traditionnelle du Hezbollah s’effrite également. Un signe marquant : les déclarations du député Tony Frangieh, fils du candidat à la présidence Sleiman Frangieh. Autrefois allié fidèle du Hezbollah — qui a bloqué les institutions libanaises pour favoriser l’élection de son père — Tony Frangieh affirme désormais que les armes du Hezbollah ne sont plus justifiables en présence d’une armée nationale et d’un président. Il déplore que la récente « guerre d’appui » ait infligé de lourdes pertes au Liban et à la communauté chiite, concluant qu’il est temps de soutenir l’État et de privilégier la diplomatie.
Ce revirement intervient dans un contexte de pression américaine croissante. La chaîne libanaise Al Jadeed a récemment diffusé un documentaire sur le Hezbollah, le décrivant comme un parti politique non autorisé — une information interprétée par certains comme une composante de la stratégie de Washington visant non seulement à désarmer le mouvement, mais à le dissoudre.
L’émissaire américaine Morgan Ortagus, bien que mesurée lors de ses rencontres avec les trois principaux dirigeants libanais, n’a laissé place à aucune ambiguïté dans sa dernière interview : le Hezbollah, a-t-elle déclaré, est un « cancer » qu’il faut éradiquer. Lors de sa visite au commandant de l’armée libanaise, le général Rodolph Haykal, elle aurait posé des questions précises sur le rôle de l’armée dans la saisie et la destruction des armes du Hezbollah, réaffirmant ainsi la position américaine selon laquelle seul l’armée doit gérer le processus de désarmement. Une approche qui va à l’encontre de celle de la France, laquelle alerte sur les risques de conflits internes si le Hezbollah est directement visé.
Dans le même temps, le président Joseph Aoun et le président du Parlement Nabih Berri discutent discrètement de la possibilité d’un dialogue national plus large sur la défense. Selon certaines sources, Berri préparerait une relance des discussions sur l’arsenal du Hezbollah, et des premiers pas auraient déjà été faits au nord du fleuve Litani — une zone clé dans les plans internationaux de reconstruction, souvent associée à un possible retrait israélien.
Le Hezbollah se trouve aujourd’hui de plus en plus acculé. Ses dépôts d’armes ont été en grande partie détruits, ses cadres ciblés par des frappes israéliennes, et son poids politique amoindri. La guerre en cours a entamé ses ressources et ses marges de manœuvre. Ses alliés traditionnels, comme la Syrie, ne lui offrent plus le même soutien fiable, le laissant encerclé : Israël au sud, la Syrie au nord et à l’est, et une hostilité américaine croissante à l’extérieur.
Malgré tout, le Hezbollah mise sur un rééquilibrage régional. Il suit de près les évolutions des discussions entre l’Iran et les États-Unis, espérant que cela lui offrira un répit. En attendant, il se prépare à une possible escalade. L’attitude offensive du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu laisse entrevoir le risque de frappes préventives multiples dans le Sud, la Békaa, voire la banlieue sud de Beyrouth.
Face à ces pressions, le Hezbollah semble prêt — du moins en apparence — à laisser l’État prendre l’initiative. Il se rapproche du président Aoun, qu’il considère comme un partenaire plus pragmatique et efficace que le Premier ministre Nawaf Salam. Ce rapprochement soulève une question clé : le Hezbollah est-il disposé à laisser Aoun entamer un véritable dialogue sur son arsenal ?
Pour l’instant, la position du parti reste nuancée. Il pourrait envisager de discuter du rôle stratégique de ses armes en tant que carte de négociation pour le Liban sur l’échiquier régional, mais l’idée d’un désarmement total demeure exclue. Les responsables du Hezbollah évoquent régulièrement le sort de ceux qui ont déjà rendu leurs armes — en particulier les Alaouites en Syrie — comme mise en garde. Comme l’a résumé récemment Ghaleb Abou Zaynab, haut responsable du parti : toute discussion sur le désarmement n’est acceptable que si les armes sont considérées comme un levier pour le Liban. En dehors de ce cadre, aucun dialogue n’est envisageable.