La principale préoccupation du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu est désormais de préparer le terrain pour les prochaines élections générales, en consolidant son emprise sur le Likoud après le revers qu’il a subi en étant contraint de signer l’accord de Gaza.

Dans les heures qui ont précédé l’accord, Netanyahu — poursuivi en justice — s’est retrouvé isolé sur la scène internationale et assiégé à l’intérieur. Son apparition aux Nations unies a résumé sa situation : l’hostilité mondiale à l’égard d’Israël montait en flèche, au point qu’aux États-Unis mêmes, certains réclamaient l’arrêt des exportations d’armes vers Israël, tandis que se multipliaient les menaces de boycotts culturels, académiques et sportifs.

Échec diplomatique : aucune crédibilité

En réalité, sous Netanyahu, Israël a connu un échec diplomatique retentissant. Selon les Israéliens eux-mêmes, le pays est apparu fragmenté et bureaucratique, s’accrochant à une rhétorique militaire dépassée faite de graphiques et de statistiques, implorant sa légitimité « morale », et ressassant frontières, menaces et droits juridiques — un langage d’un autre siècle.

Malgré la domination de Netanyahu, le discours est apparu confus et divisé. Diplomates et militaires parlaient dans des directions différentes, chacun avançant sa propre version, sans autorité centrale, sans coordination ni stratégie de gestion des crises à l’ère des réseaux sociaux et de l’information instantanée — ce qui a sapé la confiance de l’opinion internationale dans une guerre qui dépend avant tout de la crédibilité.

Il est vrai que Netanyahu est intervenu pour orchestrer une campagne médiatique et numérique unifiée, tout en centralisant la gestion du conflit et en écartant quiconque entravait sa route. Mais le récit israélien est resté stérile et inefficace.

À l’intérieur, les appels à mettre fin à la guerre se sont multipliés, motivés à la fois par son absurdité et par les échecs diplomatiques de Netanyahu, dont une attaque mal calculée contre le Qatar. Certains Israéliens estimaient déjà que leur pays s’était engagé sur la voie de l’effondrement et même de la disparition, évoquant l’idée d’une migration inverse.

Dans ce climat d’isolement et de perte de respect international, la coupe a débordé avec l’énorme pression exercée par le président américain Donald Trump, alliée à une position arabe unifiée qui pesait sur le Hamas. Trump a compris que les conditions étaient mûres pour redorer son image en tant que principal soutien d’Israël. Il voyait là l’occasion de se présenter comme le sauveur de l’État hébreu — sinon devant Netanyahu, du moins devant l’opinion israélienne. Convaincu que la question palestinienne est à l’origine de toutes les crises du Moyen-Orient, il considérait l’arrêt de la guerre à Gaza comme la première étape sur la voie de la paix régionale.

Netanyahu en avait conscience et, loin des projecteurs, s’est activé dans son parti en vue d’élections internes dans les prochaines semaines, préparant le terrain à des élections législatives anticipées. Celles-ci pourraient être couplées au congrès du Likoud le 24 du mois prochain, afin d’accélérer les étapes et de consolider son soutien, tout en retardant le plus possible la révélation des véritables conséquences de l’accord de Gaza — un « lendemain » qu’il redoute en réalité.

En attendant, il s’adresse à sa base de droite par un discours dur et intransigeant — conscient qu’il n’a aucun avenir auprès du centre ou de la gauche. Il promet de forcer le Hamas à se désarmer et à disparaître, d’assurer le retour des otages, de garantir la sécurité d’Israël et de briser l’axe iranien. Mais la majorité des Israéliens associent encore Netanyahu, malgré ses frappes contre l’Iran et en Syrie, à l’humiliation du 7 octobre il y a deux ans — la pire catastrophe sécuritaire de l’histoire du pays, survenue sous sa surveillance.

Un autre fait demeure : le plus ancien Premier ministre de l’histoire d’Israël — ayant dépassé le fondateur David Ben Gourion — ne peut concevoir une vie hors du bureau du Premier ministre, encore moins une vie politique en exil ou derrière les barreaux. Sa logique peut se résumer ainsi : « Nous avons failli, mais nous nous sommes relevés de toutes nos forces et nous avons vaincu tous les ennemis d’Israël.» Netanyahu dépeint Israël comme étant aujourd’hui dans sa position sécuritaire la plus forte, sans menace réelle.

Le défi principal reste le temps. Plus les élections s’éloignent, plus son retour devient difficile ; il doit donc les précipiter. Son opportunité réside dans les profondes divisions internes et la crise politique chronique qui pourrait mener à des élections anticipées. Le gouvernement peine à préparer le budget 2026 — le ministère des Finances n’a même pas commencé à le rédiger — s’ajoutant à d’autres crises qu’un pays fracturé ne peut résoudre. Les Israéliens réclament à Netanyahu une seule chose qu’il n’a pas su leur offrir : la sécurité.

Une opposition à têtes multiples

Il existe cependant une lueur d’espoir pour Netanyahu dans ce paysage sombre : l’opposition n’est pas unie. La droite continue de séduire un public inquiet et peu enclin à la paix, tandis que l’opposition, bien que partageant le même objectif, reste divisée par des ambitions de leadership concurrentes — allant d’une gauche fragile à une droite modérée — face à un camp d’extrême-droite discipliné et largement homogène rassemblé derrière Netanyahu.

L’opposition entend capitaliser sur l’échec de Netanyahu à Gaza, où le Hamas demeure enraciné et prêt à s’étendre dès le retrait israélien. La gouvernance civile restera un slogan vide, l’élimination de l’Autorité palestinienne tout autant, et l’annexion de la Cisjordanie un rêve lointain.

Ainsi, pour ses opposants, il n’y aura ni sécurité ni stabilité avec Netanyahu. Ce qu’il faut, disent-ils, c’est coopérer avec des partenaires internationaux et arabes, définir une stratégie claire et offrir une direction unificatrice après la guerre. La paix avec les Arabes, ajoutent-ils, garantirait des financements pour la reconstruction sous supervision internationale, à condition qu’Israël propose un partenaire autre que les extrémistes qui rejettent toute solution.

L’opposition rappellera que le « succès moral » que Netanyahu revendiquera avec la libération des otages aurait dû être obtenu bien plus tôt, afin d’améliorer l’image d’un État affaibli.

Au final, Netanyahu pourrait ne pas avoir besoin de déclencher de grandes guerres dans son « lendemain » pour revenir sur le devant de la scène, comme il l’avait fait face à l’Iran. Mais tout dépendra du maintien de la situation actuelle et de la capacité des acteurs extérieurs à pousser leurs rivaux à s’unir autour d’un programme commun — ou, au minimum, à adopter une position unifiée avant le scrutin.

Si Netanyahu devait être convaincu que ses chances s’amenuisent, les scénarios s’ouvriraient sur des guerres extérieures, à commencer par l’Iran, considéré comme la principale menace existentielle. Il pourrait garder cette option en réserve, la dégainant juste avant les élections à la Knesset — comme une surprise de dernière minute.