Depuis la fondation de la République islamique d’Iran en 1979, sa politique étrangère s’est articulée autour du concept « d’exportation de la révolution ». Au fil des décennies, Téhéran a étendu son influence régionale par l’argent, les armes et l’idéologie religieuse, violant la souveraineté des États et installant des forces par procuration. Ces relais ont fini par constituer ce que l’Iran a baptisé « l’Axe de la Résistance ».
Le « Hezbollah » en fut le joyau. Créé en 1982 à Baalbek par les Gardiens de la Révolution, il a prospéré dans un Liban miné par les divisions confessionnelles et l’effondrement de l’État — en temps de guerre comme en temps de paix. Le Liban en a payé le prix fort : l’émergence d’un État dans l’État dirigé par le parti, la paralysie des institutions, la mainmise sur les décisions de guerre et de paix, l’isolement diplomatique, et l’exclusion de l’ordre international.
Le pays est devenu la ligne de front de l’Axe dans sa confrontation avec Israël, et un terrain d’expérimentation pour la stratégie iranienne. Depuis le territoire libanais, Téhéran a mené ses « guerres d’appui », bloquant les institutions, imposant ses choix présidentiels, sapant l’identité nationale, les valeurs sociales et culturelles, et justifiant la violence sous des slogans tels que « armes sacrées », « dissuasion d’Israël » ou « libération de Jérusalem ».
Mais depuis le 7 octobre 2023 et l’opération « Déluge d’al-Aqsa », le vent a tourné. Une décision semble avoir été prise : démanteler les milices iraniennes pour faire disparaître l’Axe de la Résistance. Une fois encore, le Liban paie la facture la plus lourde. Seul véritable front actif de la doctrine dite de « l’unité des fronts », plusieurs de ses localités sont devenues des « mini-Gaza ». Les réponses venues du Yémen restent symboliques, la Syrie de Bachar al-Assad est hors jeu, et l’Irak agit avec une prudence extrême.
L’Axe de la Résistance est en déclin. L’Iran perd ses cartes une à une :
Son allié syrien est un souvenir du passé ; son éventuel successeur serait probablement hostile à Téhéran.
Ses milices sont incapables de menacer sérieusement Israël : ni avions abattus, ni officiers assassinés.
Ses ambitions balistiques et nucléaires sont catégoriquement rejetées par Washington et la communauté internationale.
Son soutien à la cause palestinienne apparaît désormais comme un simple prétexte : son vrai objectif est la survie du régime, non la libération de Jérusalem ni la disparition de « l’entité sioniste ».
Pourtant, l’Iran s’accroche à son dernier pion : le « Hezbollah ». Malgré un état de « mort clinique » face à la supériorité militaire, technologique et du renseignement israélienne, Téhéran pousse la milice à poursuivre le combat — au prix de vies libanaises.
Si le Hezbollah est le principal responsable des dégâts causés au Liban lors de l’ascension de l’Axe, c’est désormais l’État libanais qui portera la responsabilité de ce que coûtera son effondrement. Les signaux sont clairs : la communauté internationale exige le désarmement des milices, et le feu vert pour éliminer les relais de l’Iran a été donné dès le 7 octobre.
Les messages adressés à Beyrouth deviennent plus directs :
Il n’est plus question de formules diplomatiques : le désarmement du Hezbollah est une exigence explicite.
La pression en faveur de réformes rapides et sérieuses s’intensifie.
Le Liban doit saisir cette opportunité, sous peine d’être écarté du nouvel ordre régional.
La responsabilité incombe désormais aux autorités libanaises. Des discussions sans limite sur l’arsenal du Hezbollah équivalent à une fuite en avant. Le retard devient refus déguisé, et le temps perdu une faute politique. Peu importe l’intention — bonne ou mauvaise — si le résultat est le même : l’effondrement.
Le Proche-Orient est en pleine mutation. Le monde n’attendra pas que le Liban rattrape son retard. Et si l’État continue à fuir ses responsabilités, d’autres pourraient les assumer à sa place pour désamorcer l’héritage explosif de l’Axe — et ouvrir la voie à un nouveau Moyen-Orient.